puissante, mais qui nous semble, a nous autres
Aryens, en vertu de prejuges trop aveuglement acceptes, inferieure par
l'ame ou par le coeur, la race juive en un mot, disparut ou devint
preponderante. Je suis persuade que le sage peut repondre, sans qu'il y ait
dans sa reponse ni resignation ni indifference reprehensibles: "Ce qui
aura lieu sera le bonheur." Souvent, ce qui a lieu nous parait avoir tort,
mais qu'a donc fait de plus utile jusqu'ici toute la raison humaine que de
trouver une raison superieure aux torts de la nature? Tout ce qui nous
soutient, tout ce qui nous assiste, dans la vie physique comme dans la vie
morale, vient d'une sorte de justification lente et graduelle de la force
inconnue qui nous parut d'abord impitoyable. Si une race absolument
conforme a notre ideal disparait, c'est que notre ideal n'est pas
absolument conforme a l'ideal par excellence, qui est, comme je l'ai dit,
la verite intime de l'univers.
Deja, nous avons su tirer de notre experience, deja nous avons vu confirmer
par la realite d'admirables reves, d'admirables desirs, de grandes idees et
de grands sentiments d'amour, de beaute, de justice. S'il en est dans notre
imagination, de plus vastes et de plus consolants, mais qui ne
supporteraient pas l'epreuve de la realite, c'est-a-dire de la puissance
anonyme et mysterieuse de la vie, c'est qu'il faut qu'ils soient autres,
mais non qu'ils soient moins beaux, moins vastes, ni moins consolants. En
attendant que la realite se manifeste, il est peut-etre salutaire
d'entretenir un ideal qu'on s'imagine plus beau que la realite; mais apres
que celle-ci s'est enfin revelee, il devient necessaire que la flamme
ideale que nous avons nourrie de nos meilleurs desirs, ne serve plus qu'a
eclairer loyalement les beautes moins fragiles et moins complaisantes de la
masse imposante qui ecrase ces desirs. Je ne crois pas qu'il y ait en tout
ceci acceptation servile, fatalisme endormi, optimisme passif. Il est
possible que le sage perde en mainte occasion une partie de l'ardeur
obstinee, exclusive et aveugle, qui fit realiser par quelques-uns des
choses pour ainsi dire surhumaines, par cela meme qu'ils ne possedaient pas
la plenitude de la raison humaine. Mais il n'en est pas moins certain
qu'il n'est permis a aucune ame honnete d'aller chercher de l'energie, de
la bonne volonte, des illusions ou de l'aveuglement dans une region
inferieure a celle des pensees de ses meilleures heures. On ne fait
vraiment s
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