mme les
Koran-Khans du Prophete, des bardes de profession qui, en s'accompagnant
de la guitare, recitent au peuple et aux amateurs les faits, gestes,
maximes et improvisations de leur heros. La memoire de ces chanteurs,
dit M. Chodzko, est vraiment incroyable; a toute sommation, ils recitent
d'une seule haleine, et durant des heures entieres, sans la moindre
hesitation, a partir du vers qui leur est designe par les auditeurs.
PREMIERE RENCONTRE[1].
[Footnote 1: Ce premier chant est textuellement traduit de l'anglais.]
Kourroglou etait un Turkoman de la tribu de Tuka; son veritable nom
etait Roushan, et celui de son pere Mirza-Serraf. Ce dernier etait au
service du sultan Murad, gouverneur d'une des provinces du Turkestan, en
qualite de chef des haras de ce prince.
Un jour que les cavales paissaient dans les prairies qui s'etendent le
long du Jaihoun (l'Oxus), un etalon sortit de la surface des eaux, gagna
la rive, courut vers la troupe des cavales, et apres s'etre accouple a
deux d'entre elles, il se replongea dans le fleuve, ou il disparut
pour jamais. Cette etrange nouvelle ne fut pas plus tot rapportee a
Mirza-Serraf, qu'il se rendit a la prairie, et ayant fait des marques
distinctes aux deux juments designees, il recommanda aux gardiens d'en
avoir un soin particulier; puis, de retour chez lui, il consigna sur ses
livres les details de l'apparition de l'etalon, et enregistra la date
precise de cet evenement.
On sait qu'une jument donne toujours naissance a son poulain etant
debout; quand le terme fut arrive, Mirza-Serraf, qui etait present a
leur naissance, recut les jeunes poulains dans le pan de sa robe, afin
qu'ils ne fussent point blesses par leur contact avec la terre.
Il dirigea lui-meme avec le plus grand soin leur premiere education
pendant les deux annees suivantes, et surveilla les progres de leur
croissance. Malheureusement leur mauvaise mine n'etait pas propre a
inspirer beaucoup d'espoir pour l'avenir. Ils paraissaient laids a la
premiere vue, et leur robe epaisse semblait etre de crin plus que de
poil.
Un des devoirs de la charge de Mirza-Serraf etait de visiter, a tour
de role, tous les haras confies a ses soins, afin de mettre a part les
meilleurs poulains pour les ecuries du prince. Dans cette occasion, les
deux poulains merveilleux furent au nombre de ceux qu'il choisit. Quand
le prince vint en personne visiter ses ecuries, il examina attentivement
les chevaux amenes par Mirza-Ser
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