arrivera de la meme
maniere en temps convenable. Tu maconneras soigneusement la porte et
jusqu'aux moindres fentes de l'ecurie; car il est indispensable que
notre cheval demeure seul durant quarante jours, et que ni l'oeil
de l'homme ni les rayons du soleil ne viennent le troubler dans sa
solitude."
Les instructions du pere furent executees par le fils avec la plus
scrupuleuse fidelite. Le poulain fut introduit et enferme dans sa
nouvelle demeure. Il y avait deja trente-huit jours qu'il y demeurait,
cache a tous les regards, lorsqu'au trente-neuvieme la patience de
Roushan fut epuisee. Il s'approcha de l'ecurie, et ayant fait un trou de
la grandeur de l'oeil, il commenca a regarder dans l'interieur.
Le corps entier du poulain lui apparut brillant et resplendissant
comme une lampe; mais la lumiere qui en jaillissait s'affaiblit
instantanement, et puis s'eteignit comme par l'effet du simple regard de
Roushan. Il eut peur, et, refermant precipitamment la petite ouverture,
il retourna vers son pere, auquel il ne dit rien de ce qui etait arrive.
Le lendemain, juste a l'heure ou venait d'expirer le quarantieme jour
de la claustration du poulain, Mirza dit a son fils: "Le temps est
accompli, allons chercher notre cheval et commencons a le dresser."
Ils furent ensemble a l'ecurie. L'aveugle commenca a tater. la robe de
l'animal: il promena sa main sur la tete et sur le cou, sur les jambes
de devant et sur celles de derriere, comme s'il eut cherche quelque
chose, et tout a coup il s'ecria: "Qu'as-tu fait, malheureux enfant? Il
eut mieux valu pour moi que tu fusses mort dans ton berceau! Pas plus
tard qu'hier tu as laisse la lumiere tomber sur le poulain.---Tu
as devine juste, mon pere; mais comment as-tu fait pour decouvrir
cela?--Comment j'ai fait? Ce cheval avait des plumes et des ailes qui
ont ete brisees par suite de ton imprudence." A ces mois le coeur de
Roushan fut rempli d'amertume, et il tomba dans une profonde tristesse.
Mirza lui dit alors: "Ne perds pas courage; nul cheval vivant ne pourra
jamais approcher de la poussiere que souleveront les pieds de ce
coursier."
Ayant dit ainsi, l'aveugle enseigna a son fils a seller le poulain avec
une selle de feutre, et lui prescrivit de le dresser de la maniere
suivante: "Tu le feras trotter pendant les quarante premieres nuits sur
les rochers et dans les plaines pierreuses, et pendant les quarante
nuits suivantes dans l'eau et les marecages." Quand ceci fut accompli,
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