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pas a l'action de cette aventure; mais nous devons le retrouver dans la
suite de la vie de Kourroglou, et nous ne pouvons nous dispenser de
le faire connaitre au lecteur, d'autant plus qu'il y a la un trait
d'affinite avec l'aventure de Guillaume Tell, et raffine dans tous ses
details par l'ingenieuse exageration des Orientaux. On a du remarquer
aussi dans le chapitre precedent la superiorite de l'invention persane,
a propos de Kourroglou effacant, par la seule pression de ses doigts,
l'effigie d'une monnaie d'or. Les heros de chez nous se contentent de
briser la piece en deux, et croient avoir fait l'impossible. Mais le
veritable impossible ne se trouve que dans l'Orient.
Voila donc Demurchi-Oglou, le fils du forgeron, qui, du fond de sa
ville du Nakchevan, entend parler de la gloire et de la magnificence du
bandit. _Mon coeur eclate ici faute d'action_, dit Demurchi-Oglou, et le
voila parti avec son cheval pour Chamly-Bill. Kourroglou, qui chassait
aux alentours de sa forteresse, le rencontre et dit d'abord: "Voila un
beau garcon!" Demurchi lui presente sa requete. "_Mon ame_, lui repond
le maitre, tu dois savoir que je donne du pain aux braves et rien aux
laches.--Amis, dit-il a ses chasseurs, _j'ai trouve ici mon gibier _."
Il fait asseoir Demurchi sur les genoux, _a la maniere des chameaux
males_, et lui fait oter son bonnet. Puis il demande une pomme, tire
son anneau de son doigt, le fixe sur la pomme qu'il pose sur la tete de
Demurchi, se place a distance, tend son arc, et fait passer les soixante
fleches de son carquois a travers l'anneau.
Content de voir que Demurchi n'a pas sourcille, il dit a ses compagnons:
"Mes ames, mes enfants, que celui qui m'aime contribue a equiper
Demurchi-Oglou." A l'instant meme, nos bandits, sans aucune crainte de
passer pour communistes, se depouillent chacun de son habillement, de
son armure ou du harnachement de son cheval, "et il lui fut donne tant
de choses, qu'en un instant l'etranger se trouva riche."
On l'emmene a Chamly-Bill, on feta sa venue; Kourroglou improvise pour
lui au dessert, et, dans une de ses strophes, il lui dit:
"Personne sur la terre ne connaitrait mes hauts faits sans mes jolies
chansons. Oui, tout ce que j'ai fait, je l'ai fait pour mes amis, et la
passion d'un gain egoiste ne s'est jamais elevee dans mon ame."
[Illustration: Kourroglou s'approcha d'Ayvaz. (Page 9.)]
"Mais ecoutez maintenant, s'ecrie le rapsode, l'histoire de la princesse
Nig
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