meurent presque
sans aucun mouvement. Leurs longs cous enlaces l'un l'autre ne donnent
signe de vie que par de convulsives contorsions. Deux tetes avec des
yeux presque hors de leur orbites, des bouches ecumantes, d'affreux
rugissements completent le tableau.]
Il regarda son visage, mais il etait rouge, tranquille, et ne laissait
voir aucun changement. Alors il detacha la courroie qui etait derriere
sa selle, et s'en servit pour lier les jambes et les mains de Reyhan.
Ce dernier dit: "Au moment ou tu lancais ton cheval pour franchir le
precipice, je te faisais present d'Ayvaz. J'ai ete infidele a ma parole,
et pour un peche si enorme, le malheur tombe sur ma tete coupable."
Kourroglou repliqua: "En verite, nul autre homme que moi n'osera te
poursuivre, J'ai pitie de toi, et n'ai pas envie de te tuer. J'ai
seulement lie tes mains et tes jambes. Si une armee me poursuivait,
elle ne serait pas assez hardie pour continuer apres t'avoir vu ainsi
garrotte."
Kourroglou lia donc Reyhan avec une corde sur sa jument, et, ayant
remonte sur Kyrat, il conduisit la jument avec une corde. Il placa Ayvaz
derriere lui, et ils arriverent ainsi a Chamly-Bill. Les sentinelles
de Kourroglou le virent venir de loin et informerent les bandits de
l'arrivee de leur maitre. Sept cent soixante-dix-sept hommes allerent a
sa rencontre. Kourroglou commanda qu'on fut chercher une robe d'honneur
pour Ayvaz. Ayvaz la mit: Kourroglou ordonna que Khoya-Yakub, qui, tout
le temps de l'absence de Kourroglou, avait ete enchaine et confine dans
une sombre prison, fut amene devant lui. Il le recut tendrement, lui
ota ses fers, et le fit conduire au bain. Aussitot que Khoya-Yakub fut
revenu, il le revetit d'un superbe habillement, et l'invita a s'asseoir
pres de lui, a la place d'honneur.
Les bandits s'enquirent avec empressement des details de la capture
d'Ayvaz, et Kourroglou les leur dit du commencement a la fin,
n'epargnant pas les louanges a Reyhan sur sa force et son courage. Il
dit son conte en vers et en prose, fidele a sa coutume de dire la verite
a la face des gens, disant a un poltron qu'il etait un poltron, a un
brave qu'il etait un brave. Voici une des improvisations faites en
l'honneur de Reyhan:
_Improvisation_.--"Freres, Aghas! un homme doit etre un homme comme
Reyhan. Il a arrache des larmes d'admiration de mes yeux. Son bouclier
est d'argent; il repand le sang de l'ennemi avec abondance. Il a uni
mon ame a la sienne. Il a grave a la f
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