lou n'a pas d'enfants; pourquoi n'adopterait-il pas un
si beau garcon pour son fils? Mais que dois-je faire? Si, a mon retour a
Chamly-Bill, j'essaie de lui depeindre ce que j'ai vu, il ne me croira
pas." Il trouva alors un peintre dans Orfah, et lui paya un bon prix
pour faire le portrait d'Ayvaz.
Apres un voyage de quelques jours, il revint a la forteresse de
Chamly-Bill. Il fut dit a Kourroglou que son frere Khoya-Yakub etait
revenu. Il ordonna aussitot a ses hommes d'aller a sa rencontre, et de
l'amener dans la ville avec les honneurs qui lui etaient dus. Des qu'il
fut descendu de cheval, Kourroglou le baisa sur la joue, et le fit
asseoir a ses cotes, tandis que Khoya-Yakub lui baisait les deux mains,
comme a son superieur. "Hourra! mes enfants, du vin! cria Kourroglou;
buvons en l'honneur de l'arrivee de notre frere." Et ils s'assirent, et
ils burent au point que Khoya-Yakub commenca a devenir gris, et sentit
sa tete s'allumer. Kourroglou lui demanda d'ou il venait. Il repondit:
"D'Orfah!--Tu n'as pas vu, par hasard, a Orfah, un plus beau cheval que
mon Kyrat?--Je n'en ai pas vu.--Dis, as-tu vu la, des hommes plus beaux
et plus braves que mes compagnons?--Je n'en ai pas vu.--As-tu vu, dis
moi, une fete plus joyeuse que la mienne?--Je n'en ai pas vu.--As-tu vu
des echansons plus beaux et plus richement vetus que les miens?--Frere
guerrier, j'ai vu la un jeune garcon que les mains de tous vos jeunes
gens ne sont pas dignes de laver. Voila que tu deviens vieux, et que tu
n'as pas d'enfants: pourquoi ne le prendrais-tu pas pour ton fils, afin
de faire de lui, quand le temps en sera venu, un guerrier digne de te
servir et de te succeder lorsque tu seras mort, aussi bien qu'un appui
et un fils tant que tu vivras?" Il commenca alors a vanter la beaute
d'Ayvaz et sa male physionomie. Kourroglou dit: "Eh quoi! marchand qui
n'es bon a rien! ne pouvais-tu depenser quelques tumans pour payer un
peintre et m'apporter sa ressemblance?" Le marchand sortit une miniature
de son habit et la tendit a Kourroglou. Kourroglou la prit; et quand il
l'eut examinee, _les renes de sa volonte echapperent des mains de sa
patience_, et il s'ecria: "Daly-Hassan, qu'on apprete une chaine et
des fers." Le marchand, etonne, demanda ce que signifiait un ordre
semblable. "Je vais te faire enchainer, miserable!" Pour quelle raison,
et quel est mon crime? Est-ce donc la recompense que tu me donnes pour
t'avoir trouve un fils?--C'est pour le mensonge qu
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