l leur faisait etait
si liberale, qu'elle pouvait remplir le creux du bouclier de chacun
d'eux."
En peu de temps, Kourroglou se voit a la tete de 777 hommes, nombre
sacre qu'il n'eut depasse vraisemblablement que pour celui de 7777, s'il
lui eut ete possible des lors d'y atteindre.
Cependant le gouverneur de la province commence a s'alarmer du voisinage
de Kourroglou. Il lui depeche un envoye qui, sans fleur de rhetorique,
lui parle ainsi:
"Qui es-tu? Pourquoi es-tu venu ici? Si tu desires parler au souverain
d'Iran, va le trouver; mais ne demeure pas ici plus longtemps. Si tu as
quelque chose a me dire, je t'ecouterai afin de savoir ce que c'est."
Kourroglou trouve le discours de l'ambassadeur un peu familier; mais il
se ressouvient de la defense que son pere lui a faite, en mourant, de
se revolter contre le schah de Perse. Il traite donc l'envoye fort
honnetement, et lui promet d'evacuer le pays sous peu de jours.
Il rassemble ses hommes et leur chante ceci:
"L'heure du depart est arrivee. Que quiconque veut me suivre dans le
Kurdistan se tienne pret! Qu'il me suive, celui dont les levres veulent
boire dans la coupe de la valeur!--Qu'il me suive, celui qui veut mettre
en pieces le linceul de la mort!"
Les 777 brigands repondirent: "O Kourroglou, nous ne craignons pas la
mort; la ou tu iras, nous irons." Ils partent; ils arrivent dans la
vallee de Gazly-Gull, situee dans le voisinage de Khoi, et debutent par
l'extermination et le pillage d'une caravane. Le gouverneur d'Erivan,
Hussein-Ali-Khan, se met en route a la tete de quinze cents cavaliers
pour aller reprimer ces brigandages. "Ne craignez rien, o mes ames! o
mes _fous_ (_Dalcelar_)!" C'est le nom d'amitie que Kourroglou donne a
ses compagnons, c'est le titre glorieux que le posterite leur conserve:
"Ne craignez rien, je les disperserai en moins d'une heure." Kourroglou
dit, et revetu de sa cotte de mailles, arme de toutes pieces, il
attend, appuye tranquillement sur sa lance, l'envoye d'Hussein. Aux
interrogations et aux menaces de l'envoye, Kourroglou repond comme de
coutume par une chanson: "Serdar, lui dit-il, j'ai l'habitude de chanter
quelques vers avant de combattre.--Chante, si tu y es dispose, repond le
serdar, amateur de poesie comme tous les Orientaux." Kourroglou chante
ici une fort belle strophe:
"Voici la verite des verites! Ecoute-la bien, mon serdar. Je suis l'ange
de la mort. Regarde; je suis Azrail. Mes yeux aiment la couleur du
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