sition
verticale, il leva les yeux, et vit le berger qui etait debout, en
contemplation devant lui. Il lui dit: "Assieds-toi, berger, et mangeons
ensemble." Le berger repliqua: "Beg, tu as prepare toi-meme le repas,
mange-le tout seul, car je ne puis t'aider."
[Footnote 6: Environ vingt-deux livres anglaises.]
[Footnote 7: Men, en turc _balma_, poids employe commumnement en Perse.]
Alors, Kourroglou prit la cuiller et ce mit a l'oeuvre; ses enormes
et rudes moustaches genaient le passage; et le pain lui sortait de la
bouche tandis que le lait coulait dans sa poitrine. Kourroglou, en
colere, jeta la cuiller, et relevant ses moustaches qui allaient
par-dela ses oreilles, il ouvrit une bouche semblable a l'entree d'une
caverne, et, prenant l'ecuelle de ses deux mains, il avala le contenu
jusqu'a la derniere goutte. Le berger le regardait avec stupeur, si
disait en lui-meme: Par le saint nom d'Allah! ce ne peut etre la un
homme, car aucun etre humain ne pourrait avaler une telle quantite de
nourriture. Encore une fois, je le repete, voyons, au nom d'Allah!
ce qui va arriver. S'il s'enfuit maintenant, ce sera la vampire du
desert[8], ou Satan lui-meme; s'il reste, c'est un fils des hommes. On
dit que la famine incarnee est arrivee sur la terre; c'est la surement
la famine, il vient de manger tout le lait de mes brebis; mais au bout
d'une heure, il aura faim de nouveau, et alors il me devorera moi-meme."
Kourroglou pensait en lui-meme: "Comment vais-je faire pour me rendre a
Orfah et voir Ayvaz? Si je me montre sous ce costume, et monte sur ce
cheval, mon nom et ma gloire sont trop bien connus en tous pays pour
que je ne sois pas decouvert. Prenons plutot les habits du berger, et
entrons ainsi dans la ville." Il dit donc au berger: "Viens la, et
faisons l'echange de nos habits" Le berger se mit a rire et lui dit:
"Pourquoi me railler ainsi sur ma pauvrete? Le chale seul qui est sur ta
tete, ou celui qui entoure tes reins, ou bien encore le poignard qui est
passe dedans, seraient chacun suffisant pour racheter mon sang[9] et mon
troupeau avec. Pourquoi te moquer ainsi de moi?" Cela dit, il cracha
dans la paume de ses mains, saisit sa massue, et, la brandissant d'une
facon menacante, il dit a Kourroglou: "Toi, si confiant dans la largeur
de tes epaules, regarde aussi la largeur de mon cou." Kourroglou sourit
et lui dit "Berger, je te jure devant Dieu que je ne me ris pas de toi;
il y a dans cette ville un marchand qui me d
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