de peu
de valeur, etait enchante; mon pauvre ami fut immediatement attache avec
un bout de corde, et emmene par son nouveau maitre; il me regarda d'un
air douloureux; je courus de tous cotes pour chercher un passage dans la
haie, les breches etaient bouchees; je n'eus meme pas la consolation
de recevoir les adieux de mon cher Medor. Depuis ce jour je m'ennuyai
mortellement; ce fut peu de temps apres qu'eut lieu l'histoire du
marche, et ma fuite dans la foret de Saint-Evroult. Pendant les annees
qui ont suivi cette aventure, j'ai souvent, bien souvent pense a mon
ami, et j'ai bien desire le retrouver; mais ou le chercher? J'avais su
que son nouveau maitre n'habitait pas le pays, qu'il n'y etait venu que
pour voir un de ses amis.
Quand je fus amene chez votre grand'mere par mon petit Jacques, jugez de
mon bonheur en voyant quelques temps apres arriver, avec votre oncle et
vos cousins Pierre et Henri, mon ami, mon cher Medor. Il fallait voir
la surprise generale lorsqu'on vit Medor courir a moi, me faire mille
caresses, et moi le suivre partout. On crut que c'etait pour Medor la
joie de se trouver a la campagne; pour moi, on pensa que j'etais
bien aise d'avoir un compagnon de promenade. Si l'on avait pu nous
comprendre, deviner nos longues conversations, on aurait compris ce qui
nous attirait l'un vers l'autre.
Medor fut heureux de tout ce que je lui racontais de ma vie calme et
heureuse, de la bonte de mes maitres, de ma bonne et meme glorieuse
reputation dans le pays; il gemit avec moi au recit de mes tristes
aventures; il rit, tout en me blamant, des tours que j'avais joues au
fermier qui m'avait achete du pere Georget; il fremit d'orgueil au recit
de mon triomphe dans la course d'anes; il gemit de l'ingratitude des
parents de la pauvre Pauline, et il versa quelques larmes sur le triste
sort de cette malheureuse enfant.
XVII
LES ENFANTS DE L'ECOLE
Medor s'etait ecarte un jour de la maison ou il etait ne, et ou il
vivait assez heureux; il poursuivait un chat qui lui avait enleve un
morceau de viande donnee par le cuisinier. On la trouvait trop avancee;
Medor, qui n'etait pas si delicat, l'avait saisie et posee pres de sa
niche, lorsque le chat, cache a cote, s'elanca dessus et l'emporta. Mon
ami ne faisait pas souvent d'aussi friands repas; il courut a toutes
jambes apres le voleur et, l'aurait bientot attrape, si le mechant chat
n'avait imagine de grimper sur un arbre. Medor ne pouvait le suivre si
haut;
|