de la
malice comme un singe!
_Henriette_, riant:--Merci du compliment, Ferdinand! Qu'etes-vous donc,
si je suis un singe?
_Ferdinand_:--Ah! mam'zelle, je n'ai point dit que vous etiez un singe:
et si je me suis mal exprime pour cela, mettez que je suis un ane, un
cornichon, une oie.
_Henriette_:--Non, non, pas tant que cela, Ferdinand, mais seulement un
babillard qui parle quand il devrait travailler. Faites la litiere
de l'ane, ajouta-t-elle d'un ton serieux, et donnez-lui a boire et a
manger.
Elle sortit; Ferdinand fit en grommelant ce que lui avait ordonne sa
jeune maitresse. En faisant ma litiere, il me donna quelques coups de
fourche, me jeta avec humeur une botte de foin, une poignee d'avoine, et
posa pres de moi un seau d'eau. Je n'etais pas attache; j'aurais pu
m'en aller, mais j'aimai mieux souffrir encore un peu, et donner
le lendemain, pour achever ma bonne oeuvre, ma seconde et derniere
representation.
En effet, quand la journee du lendemain fut avancee, on vint me prendre;
mon maitre m'amena sur une grande place qui etait pleine de monde; on
m'avait tambourine le matin, c'est-a-dire que le tambour du village
s'etait promene partout de grand matin en criant: "Ce soir, grande
representation de l'ane savant dit Mirliflore; on se reunira a huit
heures sur la place en face la mairie et l'ecole."
Je recommencai les tours de la veille et j'y ajoutai des danses
executees avec grace; je valsai, je polkai, et je jouai a Ferdinand le
tour innocent de l'engager a valser en brayant devant lui, et en lui
presentant le pied de devant comme on criait: "Oui, oui, une valse avec
l'ane!" il s'elanca dans le cercle en riant, et il se mit a faire mille
sauts et gambades, que j'imitai de mon mieux.
Enfin, me sentant fatigue, je laissai Ferdinand gambadant tout seul,
j'allai comme la veille chercher une terrine; n'en trouvant pas, je pris
dans mes dents un panier sans couvercle, et je fis le tour, comme la
veille, presentant mon panier a chacun. Il fut bientot si plein, que
je dus le vider dans la blouse de celui qu'on croyait mon maitre; je
continuai la quete; quand tout le monde m'eut donne, je saluai la
societe et j'attendis que mon maitre eut compte l'argent que je lui
avais fait gagner ce soir-la, et qui se montait a plus de trente-quatre
francs. Trouvant que j'avais assez fait pour lui, que mon ancienne faute
etait reparee, et que je pouvais retourner chez moi, je saluai mon
maitre, et, fendant la foule, je
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