a ferai baigner a ma place;
pour ne pas degouter ma bonne, je la deshabillerai moi-meme, je la
savonnerai; je lui couperai les cheveux, qui sont tout emmeles et pleins
de petites puces blanches, mais qui ne sautent pas.
_La maman:_--Mais, ma pauvre Therese, toi-meme ne seras-tu pas degoutee
de la toucher et de la laver?
_Therese:_--Un peu, maman, mais je penserai que, si j'etais a sa place,
je serais bien heureuse qu'on voulut bien me soigner, et cette idee me
donnera du courage. Et puis, maman, voulez-vous me permettre, quand elle
sera lavee, de lui mettre quelques-unes de mes vieilles affaires jusqu'a
ce que je lui en achete d'autres?
_La maman:_--Certainement, ma petite Therese; mais avec quoi lui
acheteras-tu des vetements? Tu n'as que deux ou trois francs, tout juste
de quoi payer une chemise.
_Therese:_--Oh! maman, vous oubliez ma piece de vingt francs.
_La maman:_--Celle que tu as donnee a garder a ton papa pour ne pas la
depenser? Tu la conservais pour acheter un beau livre de messe comme
celui de Camille.
_Therese:_--Je peux bien me passer de ce beau livre de messe, maman,
j'ai encore mon vieux.
_La maman:_--Fais comme tu voudras, mon enfant; quand c'est pour faire
le bien, tu sais que je te donne une entiere liberte.
Sa maman l'embrassa, et elle alla avec elle pour voir cette petite fille
que personne ne voulait toucher.
"Si elle a quelque maladie de peau que Therese puisse gagner, se
dit-elle, je ne permettrai pas qu'elle y touche."
La petite fille attendait toujours a la porte; la maman la regarda,
examina ses mains, sa figure, et vit qu'il n'y avait que de la salete,
mais aucune maladie de peau. Seulement, elle trouva ses cheveux si
pleins de vermine, qu'elle demanda des ciseaux, fit asseoir la petite
sur l'herbe, et lui coupa les cheveux tout court sans y toucher avec les
mains. Quand ils furent tombes a terre, elle les ramassa avec une pelle,
et pria un des domestiques de les jeter sur le fumier; puis elle demanda
un baquet d'eau tiede, et, avec l'aide de Therese, elle lui savonna et
lava la tete de maniere a la bien nettoyer. Apres l'avoir essuyee, elle
dit a Therese:
--Maintenant, ma chere petite, va la faire baigner, et fais jeter ses
haillons au feu.
Camille, Madeleine et Elisabeth etaient venues aider Therese; elles
l'emmenerent toutes quatre dans la salle de bain, la deshabillerent
malgre le degout que leur inspirait la salete extreme de l'enfant et
l'odeur qu'exhalaient
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