x, et ta bourse n'est guere
remplie. Viens, et mets-toi la. Reprends ton argent, petit, j'en ai
assez pour nous deux.
Tout en mangeant ensemble, Vincent fit raconter a Emmi toute son
histoire. Quand ce fut termine, il lui dit:
--Je vois que tu as bonne tete et bon coeur, puisque tu ne t'es pas
laisse tenter par les louis d'or de cette Catiche, et que pourtant tu
n'as pas voulu l'envoyer en prison. Oublie-la et ne quitte plus ta
foret, puisque tu y es bien. Il ne tient qu'a toi de ne plus y etre
tout a fait seul. Tu sauras que j'y vais pour preparer les logements
d'une vingtaine d'ouvriers qui se disposent a abattre le taillis entre
Cernas et la Planchette.
--Ah! vous allez abattre la foret? dit Emmi consterne.
--Non! nous faisons seulement une coupe dans une partie qui ne touche
point a ton refuge du chene parlant, et je sais qu'on ne touchera
ni aujourd'hui, ni demain, a la region des vieux arbres. Sois donc
tranquille, on ne te derangera pas; mais, si tu m'en crois, mon petit,
tu viendras travailler avec nous. Tu n'es pas assez fort pour manier
la serpe et la cognee; mais, si tu es adroit, tu pourras tres-bien
preparer les liens et t'occuper au fagotage, tout en servant les
ouvriers, qui ont toujours besoin d'un gars pour faire leurs
commissions et porter leurs repas. C'est moi qui ai l'entreprise de
cette coupe. Les ouvriers sont a leurs pieces, c'est-a-dire qu'on les
paye en raison du travail qu'ils font. Je te propose de t'en rapporter
a moi pour juger de ce qu'il sera raisonnable de te donner, et je te
conseille d'accepter. La vieille Catiche a eu raison de te dire que,
quand on ne veut pas travailler, il faut etre voleur ou mendiant, et,
comme tu ne veux etre ni l'un ni l'autre, prends vite le travail que
je t'offre, l'occasion est bonne.
Enmii accepta avec joie. Le pere Vincent lui inspirait une confiance
absolue. Il se mit a sa disposition, et ils prirent ensemble le chemin
de la foret.
Il faisait nuit quand ils y arriverent, et, quoique le pere Vincent
connut bien les chemins, il eut ete embarrasse de trouver dans
l'obscurite la taille des buttes, si Emmi, qui s'etait habitue a voir
la nuit comme les chats, ne l'eut conduit par le plus court. Ils
trouverent un abri deja prepare par les ouvriers, qui y etaient venus
des la veille. Cela consistait en perches placees en pignon avec leurs
branchages, et recouvertes de grandes plaques de mousse et de gazon.
Emmi fut presente aux ouvriers et bien accue
|