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la brise, semblaient se mouvoir et s'entretenir mysterieusement. Le
plus souvent elles paraissaient dormir, et il les regardait avec un
respect mele de frayeur. Il eut craint de dire un mot, de faire un
mouvement qui eut reveille ces belles fees de la nuit et du silence.
Dans la demi-obscurite des nuits claires ou les etoiles scintillaient
comme des yeux de diamant en l'absence de la lune, il croyait saisir
les formes de ces etres fantastiques, les plis de leurs robes, les
ondulations de leurs chevelures d'argent. Aux approches du degel,
elles changeaient d'aspect et d'attitude, et il les entendait tomber
des branches avec un bruit frais et leger, comme si, en touchant
la nappe neigeuse du sol, elles eussent pris un souple elan pour
s'envoler ailleurs.
Quand la glace emprisonnait le petit ruisseau, il la cassait pour
boire, mais avec precaution, pour ne pas abimer l'edifice de cristal
que formait sa petite chute. Il aimait a regarder le long des chemins
de la foret les girandoles du givre et les stalactites irisees par le
soleil levant.
Il y avait des soirs ou l'architecture transparente des arbres prives
de feuilles se dessinait en dentelle noire sur le ciel rouge ou sur le
fond nacre des nuages eclaires par la lune. Et, l'ete, quelles chaudes
rumeurs, quels concerts d'oiseaux sous le feuillage! Il faisait la
guerre aux rongeurs et aux fureteurs friands des oeufs ou des petits
dans les nids. Il s'etait fabrique un arc et des fleches et s'etait
rendu tres-adroit a tuer les rats et les viperes. Il epargnait les
belles couleuvres inoffensives qui serpentent avec tant de grace sur
la mousse, et les charmants ecureuils, qui ne vivent que des amandes
du pin, si adroitement extraites par eux de leur cone.
Il avait si bien protege les nombreux habitants de son vieux chene que
tous le connaissaient et le laissaient circuler au milieu d'eux. Il
s'imaginait comprendre le rossignol le remerciant d'avoir sauve sa
nichee et disant tout expres pour lui ses plus beaux airs. Il ne
permettait pas aux fourmis de s'etablir dans son voisinage; mais
il laissait le pivert travailler dans le bois pour en retirer les
insectes rongeurs qui le deteriorent. Il chassait les chenilles du
feuillage. Les hannetons voraces ne trouvaient pas grace devant lui.
Tous les dimanches, il faisait a son cher arbre une toilette complete,
et en verite jamais le chene ne s'etait si bien porte et n'avait etale
une si riche et si fraiche verdure. Emmi
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