ni une separation de famille, c'est une
installation plus legere a porter et a transporter; car nous avons aussi
pour l'annee prochaine des projets de voyage. Il me semble que vous
faites un peu de meme en n'habitant pas le Coudray toute l'annee.
Esperons que nos loisirs de campagne se rencontreront et que vous ne
vous apercevrez guere par consequent de ce changement.
As-tu recu signe devie de Gueroult? Je t'ai ecrit que je l'avais vu et
qu'il m'avait promis ce que tu desires. Je n'ai pas repondu a ta lettre
de felicitations pour _Villemer:_ je comptais te retrouver ici. Je te
remercie donc aujourd'hui et j'embrasse toute ta chere famille. Amities
d'ici.
G. SAND.
DLIII
A MADAME AUGUSTINE DE BERTHOLDI, A DECIZE
Nohant, 31 mars 1864
Ma chere enfant,
Puisque Duvernet t'a dit que je quittais Nohant, il aurait pu te dire
aussi, puisque je le lui ai ecrit, que je ne le quittais pas d'une
maniere absolue, mais que je prenais seulement des arrangements pour
passer, ainsi que Maurice et Lina, une partie de l'annee a Paris. Le
succes de _Villemer_ me permet de recouvrer un peu de liberte dont
j'etais privee tout a fait a Nohant dans ces dernieres annees, grace
aux bons Berrichons, qui, depuis les gardes champetres de tout le pays
jusqu'aux amis de mes amis, et Dieu sait s'ils en ont! voulaient etre
_places_ par mon _grand credit_. Je passais ma vie en correspondances
inutiles et en complaisances oiseuses. Avec cela les visiteurs qui n'ont
jamais voulu comprendre que le soir etait mon moment de liberte et le
jour mon heure de travail! j'en etais arrivee a n'avoir plus que la
nuit pour travailler et je n'en pouvais plus. Et puis trop de depense a
Nohant, a moins de continuer ce travail ecrasant. Je change ce genre de
vie; je m'en rejouis, et je trouve drole qu'on me plaigne. Mes enfants
s'en trouveront bien aussi, puisqu'ils etaient claquemures aussi par les
visites de Paris et que nous nous arrangerons pour etre tout pres les
uns des autres a Paris, et pour revenir ensemble a Nohant quand il nous
plaira d'y passer quelque temps. On a fait sur tout cela je ne sais
quels cancans, et on me fait rire quand on me dit: "Vous allez donc nous
quitter? Comment ferez-vous pour vivre sans nous?"
Ces bons Berrichons! Il y a assez longtemps qu'ils vivent _de moi_.
Duvernet sait bien tout cela, et je m'etonne qu'il s'etonne.
DLIV
A M. HIPPOLYTE MAGEN, A MADRID
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