s centaines de fois_ de rendre des services
analogues a celui que vous reclamez de moi, j'ai reconnu la parfaite
inutilite de mes instances. Il n'y aurait donc pour vous aucun avantage
a ce que je prisse connaissance de votre manuscrit; et comment
d'ailleurs pourrais-je le faire? J'ai des armoires pleines de manuscrits
qui m'ont ete soumis, et ma vie ne suffirait pas a les lire et a les
juger. Les editeurs sont encore plus encombres; mais ils ont des
fonctionnaires competents qui ne font pas autre chose et qui, tot ou
tard, distinguent les ouvrages de merite. Soyez donc tranquille: si les
votres sont bons, ils verront le jour. La personne qui fait cet examen
chez MM. Levy est impartiale et capable. L'interet des editeurs repond
de votre cause si elle est bonne.
Agreez, monsieur, l'expression de mes sentiments distingues.
GEORGE SAND.
DLXXIX
A M. EDOUARD DE POMPERY, A PARIS
Paris, 23 decembre 1864.
Cher monsieur,
Je n'ai encore pu lire votre livre. Je ne fais pas de mon temps ce qui
me plait; mais j'ai lu l'article de la _Revue de Paris_ et je ne serai
pas parmi vos contradicteurs. Je pense comme vous sur le role que la
logique et le coeur imposent a la femme. Celles qui pretendent qu'elles
auraient le temps d'etre deputes et d'elever leurs enfants ne les ont
pas eleves elles-memes; sans cela, elles sauraient que c'est impossible.
Beaucoup de femmes de merite, excellentes meres, sont forcees, par le
travail, de confier leurs petits a des etrangeres; mais c'est le vice
d'un etat social qui, a chaque instant, meconnait et contrarie la
nature.
La femme peut bien, a un moment donne, remplir d'inspiration un role
social et politique, mais non une fonction qui la prive de sa mission
naturelle: l'amour de la famille. On m'a dit souvent que j'etais
arrieree dans mon ideal de progres, et il est certain qu'en fait de
progres l'imagination peut tout admettre. Mais le coeur est-il destine a
changer? Je ne le crois pas, et je vois la femme a jamais esclave de son
propre coeur et de ses entrailles. J'ai ecrit cela maintes fois et je le
pense toujours.
Je vous fais compliment des remarquables progres de votre talent, la
forme est excellente et rend le sujet vivant et neuf, en depit, de tout
ce qui a ete dit et ecrit sur l'eternelle question.
Bien a vous.
GEORGE SAND.
DLXXX
A MADEMOISELLE LEROYER DE CHANTEPIE,
A ANGERS
Palais
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