frere et moi, nous vous appelions le
docteur Guillotin; ce qui ne vous fachait point.
Depuis, vous etes entre dans un systeme de moderation dynastique que je
n'ai jamais compris. Nous avions change tous les deux. J'avais avance
dans mon opinion, vous aviez recule dans la votre. Mes amis combattaient
dans les elections pour vous porter a la Chambre comme l'expression de
leurs idees. Je trouvais qu'ils se trompaient, je le leur disais; mais
je n'essayais point de les arreter, parce que vous etiez excuse, a
mes yeux, de votre tiedeur politique par le role d'homme honnete et
charitable.
Votre ferveur republicaine a eu droit de m'etonner apres le 24 fevrier;
vous avez change encore une fois, je le veux bien, et j'admets que vous
ayez ete sincere, je veux le croire, d'autant plus que je vous vois,
depuis quelques jours, voter avec l'extreme gauche; mais j'ai ete
parfaitement fondee jusque-la a ne vous point croire republicain, et
je ne me suis point genee pour le dire, lorsque l'occasion s'est
rencontree.
Mais, en meme temps que j'ai le droit de dire ce que je pense, et de
penser ce que je crois vrai, je ne crois point avoir celui de me meler
a des intrigues et a des manoeuvres electorales; c'est ce que je n'ai
jamais fait, c'est ce que je ne ferai jamais. Mon role de femme s'y
oppose, ma conscience me le defend, et, si j'etais homme, je ne me
croirais pas dispensee de porter la meme droiture dans ma conduite
politique. Si j'ai ete accusee d'un acte quelconque tendant a contrarier
votre election, a noircir votre caractere prive, a tromper l'opinion sur
votre compte, je vous somme de me le faire savoir, parce que je veux y
repondre et ne pas rester sous le coup d'une calomnie.
Voila pour moi; mais, quant a vous, vous avez a m'expliquer aussi
quelle part vous avez prise a la demonstration faite contre moi par des
ouvriers de la Chatre, qui certainement n'ont point personnellement le
plus leger reproche a me faire.--Voici ce dont toutes les apparences
vous accusent:
Vous auriez excite ces ouvriers contre ma maison et contre mon nom, en
exploitant la ridicule terreur que le mot de communisme inspire a ceux
qui ne le comprennent pas. Vous auriez explique ainsi le communisme pour
exasperer ces braves gens: "Les communistes veulent prendre tous vos
biens, toutes vos terres, et vous donner six ou huit sous de salaire par
jour. Madame Dudevant est allee a Paris pour se joindre, par ses ecrits,
a ceux qui veulent realiser to
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