ule en particulier.
Il y a un moment, dans les revolutions, ou chaque parti veut essayer
de la peur pour empecher son adversaire d'agir. C'est ce qui arrive
maintenant aux quatre conspirations sourdes que je t'ai signalees hier.
On en ajoute une cinquieme aujourd'hui, et je crois qu'il y en a deux ou
trois autres. Les legitimistes ont voulu faire peur a la Republique, le
juste-milieu, les Guizot et les Regence, les Thiers et Girardin, j'en
suis sure, out aussi joue leur jeu, avec ou sans espoir d'amener un
conflit.
Mais toutes ces menaces se paralysent mutuellement; tous les clubs sont
en permanence pour la nuit, tous armes, barricades, ne laissant sortir
aucun membre, dans la crainte qu'on ne vienne les assassiner; et, comme
tous out la meme venette, tous restent enfermes sans bouger; le remede
est donc dans le mal meme. Il y en a d'exaltes qui seraient d'avis
d'attaquer les premiers; mais, comme ils ont peur d'etre attaques
auparavant, ils se tiennent sur la defensive. C'est stupide, et la
tragedie annoncee devient une comedie.
Je viens de quitter le gros Ledru-Rollin, pret a se hisser sur un gros
cheval, pour faire le tour de Paris, en riant et en se moquant de tout
cela. Etienne est en colere et dit que ca l'_embete_. Borie et son
cousin, sont enfermes au club du palais National et pestent, j'en suis
sure, de ne pas etre a _pioncer_ dans leur lit.
La population ne dort que d'un oeil, attendant le tocsin et le canon. M.
de Lamartine, qui veut etre bien avec tout le monde, a offert un asile
dans son ministere au _grand_ Cabet, qui se pose en martyr. Tout le
monde dit: "Nous sommes trahis!" Enfin, c'est superbe. Si tu etais ici,
nous irions passer le reste de la nuit a nous promener dans les rues
pour voir la grande mystification. Elle est telle, que beaucoup d'hommes
serieux donnent dedans en plein.
Il ne tiendrait qu'a moi de me poser aussi en victime; car, pour un
_Bulletin_ un peu raide que j'ai fait, il y a un dechainement de fureur
incroyable contre moi dans toute la classe bourgeoise. Je suis pourtant
fort tranquille, toute seule dans ta cambuse; mais il ne tiendrait qu'a
moi d'ecrire demain dans tous les journaux, comme Cabet ou comme defunt
Marat, que je n'ai plus une pierre ou reposer ma tete.
Demain, le gouvernement publie les grandes mesures qu'il a prises hier
sur l'impot progressif, la loi des finances, l'heritage collateral, etc.
Ce sera sans doute la fin de cette panique, et d'une betise gen
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