s cris, des cliquetis de chaines;
plusieurs voyageurs qui s'etaient moques de ces recits et qui avaient
voulu aller visiter seuls ces ruines, n'en etaient pas revenus; on n'en
avait jamais entendu parler depuis.
Quand tout le monde fut descendu d'ane, et qu'on nous eut laisses
paitre, la bride sur le cou, les papas et les mamans prirent leurs
enfants par la main, leur defendant de s'ecarter et de rester en
arriere; je les regardais avec inquietude s'eloigner et se perdre dans
ces ruines. Je m'eloignai aussi de mes camarades et je me mis a l'abri
du soleil sous une arche a moitie ruinee qui se trouvait sur une hauteur
adossee au bois, et un peu plus loin que le couvent. J'y etais depuis un
quart d'heure a peine lorsque j'entendis du bruit pres de l'arche; je
me blottis dans une epaisseur du mur ruine d'ou je pouvais voir au loin
sans etre vu. Le bruit, quoique sourd, augmentait; il semblait venir de
dessous terre.
Je ne tardai pas a voir paraitre une tete d'homme qui sortait avec
precaution d'entre les broussailles.
--Rien... dit-il tout bas apres avoir regarde autour de lui. Personne...
Vous pouvez venir camarades. Que chacun prenne un de ces anes et
l'emmene lestement.
Il se rangea pour donner passage a une douzaine d'hommes, auxquels il
dit encore a mi-voix:
--Si les anes se sauvent, ne vous amusez pas a courir apres. Vite, et
pas de bruit, c'est la consigne.
Les hommes se glisserent le long du bois, tres fourre dans cette partie
de la futaie; ils marchaient avec precaution, mais vite; les anes, qui
cherchaient l'ombre, broutaient de l'herbe pres de la lisiere du bois.
A un signal donne, chacun des voleurs prit un des anes par la bride et
l'attira dans le fourre. Ces anes, au lieu de resister, de se debattre,
de braire, pour donner l'eveil, se laisserent emmener comme des
imbeciles; un mouton n'eut pas ete plus bete. Cinq minutes apres, les
voleurs arrivaient au fourre qui se trouvait au pied de l'arche. On fit
entrer mes camarades un a un dans les broussailles, ou ils disparurent.
J'entendis le bruit de leurs pas sous terre, puis tout rentra dans le
silence.
"Voila l'explication des bruits qui effrayent le pays, pensai-je: une
bande de voleurs est cachee dans les caves du couvent. Il faut les faire
prendre; mais comment? Voila la difficulte."
Je restai cache sous ma voute, d'ou je voyais les ruines en entier et le
pays tout autour, et je n'en sortis que lorsque j'entendis les voix
des enfants qui c
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