On prevoyait que les Anglais, qui avaient concentre leurs forces de
terre et de mer a New-York, ne donneraient pas aux Francais le temps
de s'etablir a Rhode-lsland; et le general Washington informa M. de
Rochambeau que sir Henry Clinton faisait embarquer ses troupes et
ne tarderait pas a venir attaquer le corps expeditionnaire avec les
escadres reunies sous les ordres de l'amiral Arbuthnot mouillees a
_Sandy-Hook_, au-dessus de New-York, a l'embouchure de l'Hudson-River.
Le general americain surveillait ses mouvements et, tout en donnant de
frequents avis aux Francais du projet de l'attaque dirigee contre eux,
il s'efforca de s'y opposer. A cet effet, il autorisa Rochambeau a
requerir les milices de l'Etat de Boston et de Rhode-Island pour aider
son armee dans les travaux de la defense de l'ile[140]. Ces Etats
envoyerent de 4,000 a 5,000 hommes commandes par le general Heath,
qui montrerent beaucoup d'ardeur et de bonne volonte. Rochambeau n'en
garda que 2,000, dont il donna le commandement a La Fayette qui lui
avait ete envoye par Washington, et il engagea le general Heath a
renvoyer le reste a leurs moissons qui avaient ete abandonnees pour
venir a son aide.
[Note 140: Blanchard, charge par Rochambeau d'aller demander au comite
de Boston le secours des troupes provinciales, partit le 26 juillet et
se fit accompagner par un dragon saxon, amene par les Anglais,
mais passe au service des Americains. Celui-ci devait lui servir
d'interprete, mais ne savait pas le francais; il parlait l'anglais,
dont Blanchard savait a peine quelques mots. Ils durent converser _en
latin_, et "jamais cette langue ne m'a si bien servi", dit-il.]
Rochambeau, n'avait du reste pas perdu un instant. Il avait reconnu
lui-meme les principaux points de defense, fait elever le long de la
passe des batteries de gros calibre et de mortiers, et etabli des
grils pour faire rougir les boulets. Son camp couvrait la ville,
coupant l'ile en travers, sa gauche a la mer et sa droite s'appuyant
au mouillage de l'escadre qui etait embossee sous la protection des
batteries de terre qu'il avait fait etablir sur les points les plus
convenables. Il fit travailler egalement a fortifier divers points sur
lesquels l'ennemi pouvait debarquer, et ouvrir des routes pour porter
la plus grande partie de l'armee au point meme du debarquement. Dans
cette position, le corps francais pouvait toujours se porter par la
ligne la plus courte sur le point ou l'ennemi aurait v
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