es apparences de ma conduite vous feront
craindre quelque tyrannie de ma part. La societe va vous dicter une
formule de serment. Vous allez jurer de m'etre fidele et de m'etre
soumise, c'est-a-dire de n'aimer jamais que moi et de m'obeir en tout.
L'un de ces serments est une absurdite, l'autre une bassesse. Vous ne
pouvez pas repondre de votre coeur, meme quand je serais le plus grand
et le plus parfait des hommes; vous ne devez pas me promettre de
m'obeir, parce que ce serait nous avilir l'un et l'autre. Ainsi, mon
enfant, prononcez avec confiance les mots consacres sans lesquels votre
mere et le monde vous defendraient de m'appartenir; moi aussi je dirai
les paroles que le pretre et le magistrat me dicteront, puisqu'a ce prix
seulement il m'est permis de vous consacrer ma vie. Mais a ce serment de
vous proteger que la loi ma prescrit, et que je tiendrai religieusement,
j'en veux joindre un autre que les hommes n'ont pas juge necessaire a
la saintete du mariage, et sans lequel tu ne dois pas m'accepter pour
epoux. Ce serment, c'est de la respecter, et c'est a tes pieds que je
veux le faire, en presence de Dieu, le jour ou tu m'auras accepte pour
amant.
Mais des aujourd'hui je le prononce, et tu peux le regarder comme
irrevocable. Oui, Fernande, je te respecterai parce que tu es faible,
parce que tu es pure et sainte, parce que tu as droit au bonheur, ou du
moins au repos et a la liberte. Si je ne suis pas digne de remplir a
jamais ton ame, je suis capable au moins de n'en etre jamais le bourreau
ni le geolier. Si je ne puis t'inspirer un eternel amour, je saurai
t'inspirer une affection qui survivra dans ton coeur a tout le reste, et
qui t'empechera d'avoir jamais un ami plus sur et plus precieux que moi.
Souviens-toi, Fernande, que quand tu me trouveras le coeur trop vieux
pour etre ton amant, tu pourras invoquer mes cheveux blancs, et reclamer
de moi la tendresse d'un pere. Si tu crains l'autorite d'un vieillard,
je tacherai de me rajeunir, de me reporter a ton age, pour te comprendre
et pour t'inspirer la confiance et l'abandon que tu aurais pour un
frere. Si je ne reussis a remplir aucun de ces roles; si, malgre mes
soins et mon devouement, je te suis a charge, je m'eloignerai, je te
laisserai maitresse de tes actions, et tu n'entendras jamais une plainte
sortir de ma bouche.
Voila ce que je puis te promettre; le reste ne depend pas de moi. Adieu,
mon ange, reponds-moi; ta mere te laisse toute la liberte possibl
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