otre souvenir. Je ne suis
pas demonstrative, mais votre silence me peine et me fait mal plus que
je ne saurais le dire.
Caroline est-elle toujours pres de vous? Ce serait du moins une
consolation pour moi que de vous savoir heureuse et satisfaite. Je
n'attribuerais cette absence de lettre a rien de facheux et j'en
souffrirais seule. Mais que ne puis-je augurer de cette incertitude?
hors une maladie, dont je serais certainement informee par quelqu'un,
j'imagine tout. Il faut que vous ayez quelque chagrin. Mais quel
chagrin vous force a me laisser ainsi dans l'inquietude? Hippolyte me
mande que la famille Defos va partir pour Clermont[1]; ne serez-vous
pas tentee de l'accompagner? Il y a longtemps que vous projetez ce
voyage, et, au retour, vous vous arreteriez ici, ou bien nous vous
verrions en Auvergne, ou je vais passer quelques semaines, et nous
reviendrions ensemble a Nohant. Si c'est la la surprise que vous me
menagez, je ne me plaindrai pas que vous me l'ayez fait trop longtemps
desirer.
Depuis que je ne vous ai ecrit, je me suis assez bien portee; mais
j'ai eu plusieurs accidents ou j'ai failli me tuer. Je serais morte
sans un souvenir de vous, ma chere maman, et ce n'eut pas ete un de
mes moindres regrets a quitter la vie.
Je ne veux pas vous ecrire plus longuement aujourd'hui. Je vous
gronderais, je crois, et ce serait passablement ridicule. Il y a deja
longtemps que j'ai sur le coeur de vous reprocher votre paresse, et
que je recule toujours, esperant une lettre; mais elle n'arrive pas.
Adieu, ma chere maman; pardonnez-moi d'etre un peu en colere contre
vous et faites-moi voir, je vous en prie, que vous vous ressouvenez
d'une fille que vous avez en Berry et qui vous aime plus que vous ne
songez a elle.
[1] Clermont-Ferrand (Puy-de-Dome).
XV
A LA MEME
Nohant, 17 juillet 1827.
Ma chere maman,
Je vous remercie de m'avoir donne de vos nouvelles. Je commencais a
etre inquiete, non de votre sante, que je savais etre bonne, mais de
votre oubli. Grace a Dieu, vous vous portez bien et vous n'avez que
des contrarietes; c'est encore trop.
Vous etes bien malheureuse dans le choix de vos servantes; mais ce
n'est pas a dire, parce que vous n'en avez point encore trouve de
bonnes, qu'il n'y en ait point et que vous deviez vous resoudre a vous
servir vous-meme. Peut-etre vous lasserez-vous bientot de n'etre pas
chez vous, et il n'est pas prudent a vous, qui ete
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