bete_, comme dit Pauline; et ce serait dommage
d'en perdre l'habitude. Ayez la bonte de m'acheter trois ou quatre
petites boites de poudre de corail pour les dents, comme celle que
vous m'avez donnee une fois; plus une aune de levantine noire au grand
large: c'est pour faire un tablier _sans couture_. En expliquant
l'affaire, vous trouverez cela dans un bon magasin de soieries. Plus,
j'ai une guitare chez Puget que je desirerais ravoir (la guitare,
s'entend). Veuillez la faire redemander par madame Saint-Agnan, et,
s'il n'y a pas de boite, veuillez la faire emballer et tenir ces
choses pretes chez vous, ou M. de Seze les ira prendre pour me les
apporter. Cela lui procurera le plaisir de vous voir, dont il est fort
desireux. Il nous a demande votre adresse.
Remettez-lui aussi le volume de Paul-Louis Courier, et recevez tous
mes remerciements.
XXXII
A M. JULES BOUGOIRAN, A NOHANT
Perigueux, 30 novembre 1829.
Mon cher Jules,
Comment vont mes enfants? et vous? et tous les miens? Je suis
impatiente d'avoir de vos nouvelles et des leurs. Je n'en ai pas
encore recu et je suis bien pres de m'en tourmenter.
Vous etiez de retour a Nohant vendredi soir, vous auriez du m'ecrire
le lendemain; peut-etre demain matin aurai-je une lettre de vous ou de
mon frere. J'en ai besoin pour etre tout a fait contente; car, a _tous
autres egards_ (vous pretendez que c'est mon mot), je suis bien de
corps et d'esprit.
Mon voyage a ete sinon rapide, du moins heureux. Ma sante est fort
bonne et mon coeur assez content. Hatez-vous donc de me dire que ma
famille va bien aussi; mon Maurice surtout, mon mechant drole, que
j'aime pourtant plus que tout au monde, et sans lequel je n'aurais pas
de bonheur. Dort-il? mange-t-il? est-il gai? est-il bien? Ne soyez pas
trop indulgent pour lui, et, pourtant, le plus que vous pourrez,
faites-lui aimer le travail. Je sais bien que ce n'est pas chose
aisee. Quand je suis la pour secher ses pleurs et le voir ensuite
dormir dans son berceau, je ne m'en inquiete guere; mais, de loin, ma
faiblesse de mere se reveille, et je ne sens plus que de la douleur,
en songeant qu'il est peut-etre a se lamenter devant son livre. Sotte
chose que l'enfance de l'homme, sotte chose que sa vie tout entiere!
Enfin, mon cher enfant, faites pour lui ce que vous feriez, ce que
vous ferez un jour pour votre propre fils. Suivez son education; mais,
avant tout, surveillez sa sante. Ay
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