que nous avons passee
durant le carnaval: courses a cheval, visites, soirees, diners, tous
les jours ont ete pris, et nous avons beaucoup moins habite Nohant que
la Chatre et les grands chemins.
Enfin, nous voici rentres dans un ordre de choses plus paisible, et je
commence, pour que la retraite me soit aussi agreable que les plaisirs
me l'ont ete, par vous demander de vos nouvelles et vous assurer que
je voudrais que vous fussiez ici, ou vous vous porteriez bien et vous
amuseriez, j'en suis sure. Un peu de mouvement en voiture, la societe
de personnes gaies et aimables comme celles dont notre intimite est
composee vous plairaient, a vous qui n'aimez pas plus que moi la gene
et les obligations. Le coin du feu a aussi ses plaisirs. Hippolyte
l'egaye par son caractere facile, egal, toujours bon et content. Nous
rions, chantons et dansons comme des fous, et jamais, depuis bien des
hivers, je ne me suis si bien portee. Je lui en attribue tout
l'honneur.
Avez-vous toujours votre petit compagnon Oscar? Hippolyte m'a dit
qu'il etait fort gentil, mais assez delicat. Maurice grandit beaucoup
et n'est pas non plus tres robuste maintenant. C'est l'age, dit-on, ou
le temperament se developpe, non sans quelque effort et quelque
fatigue. Il est joli comme un ange, et fort bon. Sa soeur est une
masse de graisse, blanche et rose, ou on ne voit encore ni nez, ni
yeux, ni bouche. C'est un enfant superbe, quoique ne imperceptible;
mais, pour esperer que ce soit une fille, il faut attendre qu'elle ait
une figure. Jusqu'ici, elle en a deux aussi rondes et aussi joufflues
l'une que l'autre.... Elle a toujours une bonne nourrice, dont elle se
trouve fort bien.
Le mois prochain, vous verrez mon mari, qui retournera avec Hippolyte
vendre son cheval. De la, nous irons un mois a Bordeaux et un mois a
Nerac, chez ma belle-mere, et nous serons de retour ici au mois de
juillet. Si vous voulez, a cette epoque, tenir votre promesse, et
decider Caroline a vous accompagner, nous passerons en famille tout le
temps que vous voudrez; car je n'aurai plus d'obligations de toute
l'annee, et il me faut des obligations pour quitter Nohant, ou j'ai
pris racine. Nous vous soignerons bien et vous rajeunirez si fort, que
vous retournerez a Paris fraiche et encore tres dangereuse pour
beaucoup de tetes.
Adieu, ma chere maman. Casimir, Hippolyte, mes deux enfants et moi
vous embrassons tous bien tendrement. Gare a vous, au milieu d'un
pareil conflit! vous a
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