eut pas bien rendre et qui donnent
au regard beaucoup d'agrement, de tres vives couleurs roses avec un
teint demi-brun, demi-clair, les prunelles d'un noir orange,
c'est-a-dire d'un moins beau noir que les votres, mais presque aussi
grandes; enfin, en faisant un effort d'imagination, vous pourrez
prendre une idee de sa petite mine, qui sera, je crois, par la suite,
plutot belle que jolie.
La taille est sans defauts: svelte, droite comme un palmier, souple et
gracieuse; les pieds et les mains sont tres petits; le caractere est
un peu emporte, un peu volontaire, un peu tetu. Cependant le coeur est
excellent, et l'intelligence tres susceptible de developpement. Il lit
tres bien et commence a ecrire; il commence aussi la musique,
l'orthographe et la geographie; cette derniere, etude est pour lui un
plaisir.
Voila bien des bavardages de mere; mais vous ne m'en ferez pas de
reproches, vous savez ce que c'est. Pour moi, je n'ai pas autre chose
dans l'esprit que mes lecons, et j'y sacrifie mes anciens plaisirs.
Voici le moment ou tous mes soins deviennent necessaires. L'education
d'un garcon n'est pas une chose a negliger. Je m'applaudis plus que
jamais d'etre forcee de vivre a la campagne, ou je puis me livrer
entierement a l'instruction.
Je n'ai aucun regret aux plaisirs de Paris; j'aime bien le spectacle
et les courses quand j'y suis; mais heureusement je sais aussi n'y pas
penser quand je n'y suis pas et quand je ne peux pas y aller. Il y a
une chose sur laquelle je ne prends pas aussi facilement mon parti:
c'est d'etre eloignee de vous, a qui je serais si heureuse de
presenter mes enfants, et que je voudrais pouvoir entourer de soins et
de bonheur. Vous m'affligez vivement en me refusant sans cesse le
moyen de m'acquitter d'un devoir qui me serait si doux a remplir.
Moi-meme, j'ose a peine vous presser, dans la crainte de ne pouvoir
vous offrir ici les plaisirs que vous trouvez a Paris, et que la
campagne ne peut fournir. Je suis pourtant bien sure interieurement
que, si la tendresse et les attentions suffisaient pour vous rendre la
vie agreable, vous gouteriez celle que je voudrais vous creer ici.
Adieu, ma chere maman; nous vous embrassons tous, les grands comme les
petits. Ecrivez-moi donc! ce n'est pas assez pour moi d'apprendre que
vous vous portez bien, je veux encore que vous me le disiez et que
vous me donniez une benediction.
XXXVI
A LA MEME
Nohant, fevrier 18
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