deposai Pauline pres d'un baquet plein d'eau afin
qu'elle put s'en mouiller le front et les tempes en revenant a elle, ce
qui ne tarda pas a arriver. Quand elle se vit sauvee et a l'abri de
tout danger, elle se jeta a genoux, et fit une priere touchante pour
remercier Dieu de l'avoir preservee d'un si terrible danger. Ensuite
elle me remercia avec une tendresse et une reconnaissance qui
m'attendrirent. Elle but quelques gorgees de l'eau du baquet et ecouta.
Le feu continuait ses ravages, tout brulait; on entendait encore
quelques cris, mais vaguement, et sans pouvoir reconnaitre les voix.
"Pauvre maman et pauvre papa! dit Pauline, ils doivent croire que
j'ai peri en leur desobeissant, en allant a la recherche de Cadichon.
Maintenant il faut attendre que le feu soit eteint. Nous passerons sans
doute la nuit dans la cave. Bon Cadichon, ajouta-t-elle, c'est grace a
toi que je vis."
Elle ne parla plus; elle s'etait assise sur une caisse renversee, et je
vis qu'elle dormait. Sa tete etait appuyee sur un tonneau vide. Je me
sentais fatigue, et j'avais soif. Je bus l'eau du baquet; je m'etendis
pres de la porte, et je ne tardai pas a m'endormir de mon cote.
Je me reveillai au petit jour. Pauline dormait encore. Je me levai
doucement; j'allai a la porte, que j'entr'ouvris; tout etait brule et
tout etait eteint; on pouvait facilement enjamber les decombres et
arriver en dehors de la cour du chateau. Je fis un leger _hi! han!_ pour
eveiller ma maitresse. En effet, elle ouvrit les yeux, et, me voyant
pres de la porte, elle y courut et regarda autour d'elle.
"Tout brule! dit-elle tristement. Tout perdu! Je ne verrai plus le
chateau, je serai morte avant qu'il soit rebati, je le sens; je suis
faible et malade, tres malade, quoi qu'en dise maman....
"Viens, mon Cadichon, continua-t-elle apres etre restee quelques
instants pensive et immobile; viens, sortons maintenant; il faut que je
trouve maman et papa pour les rassurer. Ils me croient morte!"
Elle franchit legerement les pierres tombees, les murs ecroules, les
poutres encore fumantes. Je la suivais; nous arrivames bientot sur
l'herbe; la elle monta sur mon dos, et je me dirigeai vers le village.
Nous ne tardames pas a trouver la maison ou s'etaient refugies les
parents de Pauline; croyant leur fille perdue, ils etaient dans un grand
chagrin.
Quand ils l'apercurent, ils pousserent un cri de joie et s'elancerent
vers elle. Elle leur raconta avec quelle intelligence et
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