s idees plus justes de
ses fonctions."]
Le 21, la _Surveillante_ prit un gros bateau anglais charge de bois,
venant de Savannah.
Un sondage execute le 4 juillet indiqua qu'on etait sur les cotes de
la Virginie. A dix heures du matin le _Duc de Bourgogne_, l'_Amazone_
et la _Surveillante_ prirent un gros bateau arme, qui ne se rendit
qu'apres avoir recu quelques coups de canon. D'apres les papiers de ce
batiment, on sut qu'apres la prise de Charleston, l'amiral Arbuthnot
et le general Clinton etaient rentres a New-York. Ils avaient laisse
cinq mille hommes dans la premiere ville, sous les ordres de lord
Cornwallis. Le soir meme, au moment ou l'on se disposait a mouiller
devant le cap Henry, on apercut a l'avant une flotte dans laquelle on
ne comptait pas moins de dix-huit voiles. On jugea que le batiment
pris n'etait qu'une mouche chargee de surveiller l'approche des
Francais, et l'on presuma que c'etaient les six vaisseaux deja
combattus le 20 juin qui s'etaient rallies aux forces de Graves et
d'Arbuthnot. M. de Ternay s'appliqua en consequence a eviter leur
attaque. Il vira de bord, fit quelques fausses routes pendant la nuit,
et se dirigea ensuite de nouveau vers le nord-ouest.
M. de Ternay venait encore de perdre une belle occasion de donner a
l'expedition de brillants debuts. Les dix-huit voiles signalees
devant la baie de Chesapeak n'etaient en effet qu'un convoi venant de
Charleston a New-York, sous l'escorte de quelques fregates. Sa
meprise lui attira de nouveaux reproches, plus durs peut-etre que les
premiers, et auxquels il pouvait repondre par les memes excuses.
Des pilotes de l'ile de _Marthas-Vinyard_, des bancs de Nantucket,
dirigerent le convoi vers le mouillage de Rhode-Island, ou l'on
atterra, sous la conduite du colonel Elliot envoye par le general
americain, apres quatre jours de brumes epaisses et d'alternatives de
calmes et de vents contraires.
Le lendemain, apres soixante-dix jours de traversee, la flotte entrait
dans la rade de Newport[134].
"Apres une si longue traversee et de si justes alarmes, on peut
concevoir notre joie; nous touchions enfin cette terre si desiree ou
la seule apparition du drapeau francais allait ranimer les esperances
des defenseurs de la liberte. Nous fumes accueillis par les
acclamations du petit nombre de patriotes restes sur cette ile
naguere occupee par les Anglais et qu'ils avaient ete forces
d'abandonner[135]."
[Note 134: La route suivie par l'escadre
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