une fois une affirmation si
invraisemblable et si contraire au jugement que les contemporains de
Washington et la posterite ont porte sur ce grand homme.
La capitulation que signa Washington avec une entiere confiance etait
redigee en francais, c'est-a-dire dans une langue que n'entendaient
ni le colonel Washington ni aucun des hommes de son detachement.
L'interprete hollandais qui en donna la lecture aux Americains
traduisit le mot _assassinat_ pour l'equivalent de _mort_ ou _perte_,
soit par ignorance, soit par une manoeuvre coupable; et l'on considera
comme un aveu de Washington ce qui ne fut que l'effet de sa bonne foi
surprise.
M. More de Pontgibaud, dans ses memoires deja cites (p. 15), justifie
Washington de l'accusation qu'il avait entendu porter contre lui en
France. "Il est plus que constant dans la tradition du pays, dit-il,
que M. de Jumonville fut tue par la faute, par l'erreur et le fait
d'un soldat qui tira sur lui, soit qu'il le crut ou ne le crut point
parlementaire, mais que le commandant du fort ne donna pas l'ordre de
tirer; la garantie la plus irrecusable est le caractere de douceur,
de magnanimite du general Washington, qui ne s'est jamais dementi au
milieu des chances de la guerre et de toutes les epreuves de la bonne
ou de la mauvaise fortune. Mais M. Thomas (de l'Academie francaise)
a trouve plus poetique et plus national de presenter ce malheureux
evenement sous un jour odieux pour l'officier anglais." V. aussi
_Histoire des Etats-Unis_, par Ed. Laboulaye. Paris, 1866, II, 50, ou
cette affaire est examinee.]
[Note 58: Dont le meilleur recit est _Braddock's Expedition_, par
Winthrop Sergant, publie dans les _Memoires_ de la Societe historique
de Pensylvanie, 1855.]
Enfin, en 1755, toujours sans que la guerre eut ete encore declaree,
l'amiral anglais Boscawen captura des vaisseaux de ligne francais a
l'embouchure du Saint-Laurent, tandis que les corsaires anglais, se
repandant sur les mers, s'emparaient de plus de trois cents batiments
marchands portant pour pres de trente millions de francs de
marchandises et emmenaient prisonniers sur les pontons plus de huit
mille marins francais. En presence d'une si audacieuse violation du
droit des gens, malgre son apathie et sa honteuse indifference pour
les interets publics, le roi Louis XV fut oblige de declarer la guerre
a l'Angleterre[59].
[Note 59: 1756. Juin le 9.]
Il etait de l'interet de la France de laisser a la lutte son caractere
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