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facilite on privait a cette epoque les jeunes gens des meilleures
familles de France de leur liberte au moyen des lettres de cachet.
C'est du chateau de Pierre-en-Cise, pres de Lyon, ou il etait enferme
en vertu d'un de ces ordres arbitraires de detention, qu'il s'evada
pour passer aux Etats-Unis. (V. ses _Memoires_ et les _Notices
biographiques_.)]
[Note 74: Les _Memoires_ de La Fayette, ou nous puisons ces
Renseignements, disent, entre autres, le baron de Kalb.]
La Fayette evita avec bonheur les croiseurs anglais et les vaisseaux
francais envoyes a sa poursuite. Enfin, apres sept semaines d'une
traversee hasardeuse, il arriva a Georgetown, et, muni des lettres de
recommandation de Deane, il se rendit au Congres.
Apres son habile manoeuvre de Trenton, Washington etait reste dans
son camp de Middlebrook. Mais les Anglais preparaient contre lui une
campagne decisive. Burgoyne s'avancait du Nord avec 10,000 hommes. Le
general americain Saint-Clair venait d'abandonner Ticonderoga pour
sauver son corps de troupes. En meme temps, 18,000 hommes au service
de la Grande-Bretagne faisaient voile de New-York, et les deux Howe se
reunissaient pour une operation secrete. Rhode-Island etait occupe par
un corps ennemi, et le general Clinton, reste a New-York, preparait
une expedition.
C'est dans ces conjonctures difficiles que La Fayette fut presente a
Washington. Le general americain avait alors quarante-cinq ans. Il
n'avait pas d'enfant sur lequel il put reporter son affection. Son
caractere, naturellement austere, etait peu expansif. Les fonctions
importantes dont il etait charge, les soucis qui l'accablaient depuis
le commencement de la guerre, les deceptions qu'il avait eprouvees,
remplissaient son ame d'une melancolie que la situation presente des
affaires changeait en tristesse[75]. C'est au moment ou son coeur
etait plonge dans le plus grand abattement que, suivant ses propres
paroles, La Fayette vint dissiper ses sombres pensees comme l'aube
vient dissiper la nuit.
[Note 75: Washington n'avait pas seulement a pourvoir aux besoins
d'une armee privee de toutes ressources, il lui fallait encore
combattre les menees et les calomnies des mecontents et des jaloux.
Les accusations graves qu'on porta meme contre lui et les insinuations
blessantes pour son honneur qui arriverent a ses oreilles le forcerent
a solliciter du Congres un examen Scrupuleux de sa conduite. On est
alle jusqu'a fabriquer des lettres qu'on pu
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