de Paris elle ne conserva que les petites iles de Saint-Pierre et
Miquelon avec droit de peche pres de Terre-Neuve et dans le golfe
Saint-Laurent. Elle recouvra la Guadeloupe, Marie-Galante, la
Desirade, la Martinique; mais ceda la partie orientale de la Louisiane
aux Espagnols.
L'Angleterre avait atteint son but; l'expulsion complete des Francais
du continent americain et la ruine de leur marine.
Choiseul eut a coeur de relever la France de cet abaissement. Il
essaya de reorganiser l'armee en diminuant les dilapidations et en
constituant des cadres sur de nouvelles bases. Il souleva un mouvement
patriotique dans les parlements pour que chacun d'eux fournit un
navire a l'Etat, et l'Angleterre vit avec douleur renaitre cette
marine qu'elle croyait a jamais perdue.
Sous son administration la France acquit soixante-quatre vaisseaux
et cinquante fregates ou corvettes qui firent sentir a l'Angleterre,
pendant la guerre d'Amerique que les desastres de la guerre de Sept
Ans n'avaient pas ete irreparables[60].
En meme temps que Choiseul soutenait l'Espagne dans son antagonisme
contre l'Angleterre, il se tenait au courant des rapports des colonies
americaines avec leur mere patrie. Sa correspondance nous le montre
perseverant dans sa haine pour la rivale de la France, etudiant les
moyens les plus propres a abaisser sa puissance, inquiet surtout du
developpement de ses colonies. Il encourageait de tout son pouvoir
et par des agents qui, comme de Pontleroy[61], de Kalb[62],
Bonvouloir[63], ne manquaient ni de talents, ni d'energie,
l'opposition naissante de ces colonies qui, des 1763, semblaient deja
pretes a passer a l'etat de revolte contre la metropole[64].
[Note 60: C'est sous son ministere que la France s'empara de la Corse
et que naquit dans cette ile, deux mois apres, le plus grand ennemi de
l'Angleterre, Napoleon. On trouve dans les _Memoires imprimes sous
ses yeux, dans son cabinet, a Chanteloup,_ 1778, ses raisons pour
l'acquisition de la Corse, I, 103.]
[Note 61: _Pontleroy,_ lieutenant de vaisseau au departement de
Rochefort, charge en 1764, par M. de Choiseul, d'aller visiter les
colonies anglaises d'Amerique. M. le comte de Guerchy, ambassadeur a
Londres, par une depeche du 19 octobre 1766, demande de nouveau pour
ce meme Pontleroy des lettres et un passe-port, au nom de _Beaulieu_,
qu'il portait en Amerique. Durand ecrivait un peu auparavant a M. de
Choiseul que Pontleroy n'avait pas le talent d'ecrir
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