d'environ quarante-neuf ans (1782); il est grand,
noblement fait, tres-bien proportionne; sa figure est beaucoup plus
agreable que ses portraits ne le representent; il etait encore
tres-beau il y a trois ans, et quoique les gens qui ne l'ont pas
quitte depuis cette epoque disent qu'il leur parait fort vieilli, il
est incontestable que ce general est encore frais et agile comme un
jeune homme.
"Sa physionomie est douce et ouverte, son abord est froid quoique
poli, son oeil pensif semble plus attentif qu'etincelant, mais son
regard est doux, noble et assure. Il conserve dans sa conduite privee
cette decence polie et attentive qui satisfait tout le monde et cette
dignite reservee qui n'offense pas. Il est ennemi de l'ostentation et
de la vaine gloire. Son caractere est toujours egal, il n'a jamais
temoigne la moindre humeur. Modeste jusqu'a l'humilite, il semble ne
pas s'estimer a ce qu'il vaut. Il recoit de bonne grace les hommages
qu'on lui rend, mais il les evite plutot qu'il ne les cherche. Sa
societe est agreable et douce. Toujours serieux, jamais distrait,
toujours simple, toujours libre et affable sans etre familier, le
respect qu'il inspire ne devient jamais penible. Il parle peu en
general et d'un ton de voix fort bas; mais il est si attentif a ce
qu'on lui dit, que, persuade qu'il vous a compris, on le dispenserait
presque de repondre. Cette conduite lui a ete bien utile en plusieurs
circonstances. Personne n'a eu plus besoin que lui d'user de
circonspection et de peser ses paroles.
"Il joint a une tranquillite d'ame inalterable un jugement exquis, et
on ne peut guere lui reprocher qu'un peu de lenteur a se determiner
et meme a agir. Quand il a pris son parti, son courage est calme et
brillant. Mais pour apprecier d'une maniere sure l'etendue de ses
talents et pour lui donner le nom de grand homme de guerre, je crois
qu'il faudrait l'avoir vu a la tete d'une plus grande armee avec plus
de moyens et vis-a-vis d'un ennemi moins superieur. On peut au moins
lui donner le titre d'excellent patriote, d'homme sage et vertueux, et
on est bien tente de lui donner toutes les qualites, meme celles que
les circonstances ne lui ont pas permis de developper.
"Il fut unanimement appele au commandement de l'armee. Jamais homme ne
fut plus propre a conduire des Americains et n'a mis dans sa conduite
plus de suite, de sagesse, de constance et de raison.
"M. Washington ne recoit aucun appointement comme general. Il les
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