lle, le
present que je vous ai fait. Me mettre au rang d'un ane! Temoigner a un
ane la meme tendresse qu'a moi!
Et, arrachant le medaillon des mains de la malheureuse Pauline
stupefaite, elle le lanca a terre, pietina dessus et le brisa en mille
morceaux. Puis, sans regarder sa fille, elle sortit de l'ecurie en
fermant la porte avec violence.
Pauline, surprise, effrayee de cette colere subite, resta un moment
immobile. Elle ne tarda pas a eclater en sanglots, et, se jetant a mon
cou, elle me dit:
"Cadichon, Cadichon, tu vois comme on me traite! On ne veut pas que je
t'aime, mais je t'aimerai malgre eux et plus qu'eux, parce que toi tu es
bon, tu ne me grondes jamais; tu ne me causes jamais aucun chagrin,
et tu cherches a m'amuser dans nos promenades. Helas! Cadichon, quel
malheur que tu ne puisses ni me comprendre ni me parler! Que de choses
je te dirais!"
Pauline se tut: et elle se jeta par terre et continua a pleurer
doucement. J'etais touche et attriste de son chagrin, mais je ne pouvais
la consoler ni meme lui faire savoir que je la comprenais. J'eprouvais
une colere furieuse contre cette mere qui, par betise ou par exces de
tendresse pour sa fille, la rendait malheureuse. Si j'avais pu, je lui
aurais fait comprendre le chagrin qu'elle causait a Pauline, le mal
qu'elle faisait a cette sante si delicate, mais je ne pouvais parler,
et je regardais avec tristesse couler les larmes de Pauline. Un quart
d'heure a peine s'etait ecoule depuis le depart de la maman, lorsqu'une
femme de chambre ouvrit la porte, appela Pauline, et lui dit:
--Mademoiselle, votre maman vous demande, elle ne veut pas que vous
restiez a l'ecurie de Cadichon, ni meme que vous y entriez.
--Cadichon, mon pauvre Cadichon! s'ecria Pauline, on ne veut donc plus
que je le voie!
--Si fait, mademoiselle, mais seulement quand vous irez en promenade;
votre maman dit que votre place est au salon et pas a l'ecurie.
Pauline ne repliqua pas, elle savait que sa maman voulait etre obeie;
elle m'embrassa une derniere fois; je sentis couler ses larmes sur mon
cou. Elle sortit et ne rentra plus. Depuis ce temps, Pauline devint plus
triste et plus souffrante; elle toussait; je la voyais palir et maigrir.
Le mauvais temps rendait nos promenades plus rares et moins longues.
Quand on m'amenait devant le perron du chateau, Pauline montait sur mon
dos sans me parler; mais, quand nous etions hors de vue, elle sautait a
terre, me caressait, et me racontait
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