ras,
abordait recemment la question dans un judicieux article: "... On
s'employa a le calmer, puis a le faire taire, puis a endormir ses
soupcons. Tout fut bon pour cela. Il sortait du delire. On l'en avertit.
On lui dit: "Il faut que vous ayez reve une fois de plus." George, en
outre, lui rappela les hallucinations qu'il avait eues dans son enfance
et qui lui etaient meme revenues devant elle.... Un jour qu'il repetait
ce qu'il appelait ses reveries de folles, l'on s'emporta jusqu'a lui
faire la menace decisive, celle qu'il avait crainte jusqu'a ce moment de
sa vie et dont il se souvint jusqu'au dernier soupir: on le menaca de la
maison de sante... La peur acheva donc de dompter les revoltes et les
inquietudes d'Alfred. Il admit des lors ce qu'il plut a George de
conter. Il alla plus loin. A la longue, le souvenir de ces soupcons,
egalement injurieux pour l'amour et l'amitie, le penetrerent de
scrupules... Et ceci est la these meme de la _Confession d'un enfant du
siecle_[100]..."--C'est, je crois, beaucoup noircir George Sand; car elle
etait capable de l'aimer encore, et cette fois desesperement. Pourquoi
ne pas s'en tenir a l'explication naturelle, la detresse des sens aupres
d'un malade?... Mais que penser de la candeur du poete devant la subtile
psychologie de son amie,--sa maitresse vraiment,--quand nous aurons vu
celle-ci lui ecrire a Paris: "Oh! cette nuit d'enthousiasme ou, _malgre
nous_, tu joignis nos mains, en nous disant: "Vous vous aimez et vous
m'aimez pourtant. Vous m'avez sauve ame et corps!"--N'oublions pas
qu'ils etaient a Venise, dans la Romantique eternelle, aimantes de
fievreuse folie par la ville d'amour.
[Note 100: CH. MAURRAS, _Petits menages romantiques_, dans la _Gazelle
de France_ du 15 oct. 1896.]
La plus grave accusation portee contre George Sand par Paul de Musset,
celle d'avoir greffe la terreur sur la jalousie dans les tourments du
poete convalescent, merite de nous arreter. L'auteur de _Lui et Elle_
donne encore son recit pour conforme a une dictee de son frere. Elle a
ete conservee: on ne peut guere mettre en doute l'authentique valeur de
ce document. J'en dois aussi la communication a Mme Lardin de Musset.
On comparera ce second recit "dicte par Alfred de Musset, en decembre
1852", avec le passage en question du roman:
Nous etions loges a Saint-Moise, dans une petite rue qui aboutissait
au traghetto du Grand-Canal. Je m'expliquai un soir avec George Sand.
Elle nia effronte
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