es la dotent d'un climat de
tropiques; pendant le milieu des journees, malgre la mer voisine, la
temperature est accablante; Durazzo, etageant ses maisons en plein midi
et les allongeant au pourtour de la colline, recueille et conserve la
chaleur comme une serre; il faut fuir a l'interieur vers les verdures et
les sources dont la rive adriatique est privee.
Pendant tout l'ete, consuls, beys et riches commercants fixent leur
demeure a Tirana, celebree en toute l'Albanie comme une des plus jolies
villes du pays; sa vallee est renommee par ses verts ombrages et sa
fertilite; on envie ceux qui y possedent un "tchiflik" ou maison de
campagne; ses eaux et ses arbres, comme les forets proches, y
entretiennent la fraicheur.
Il faut, me dit-on a Durazzo, sept heures pour atteindre Tirana; la
route, tres frequentee en toute saison et surtout en celle-ci, est une
des moins mauvaises du pays; mais des crues et des orages l'ont coupee
en quelques endroits et on me conseille vivement d'en faire le trajet a
cheval; je fais donc seller des chevaux du pays et vers cinq heures du
soir, quand l'air devient respirable, nous partons; nous suivons d'abord
la grande route vers la vallee du Scoumbi; le chemin longe la mer et des
marecages, et la chaussee est construite en talus; bientot nous quittons
la region des sables et des alluvions cotieres; un dos de pays
faiblement ondule separe la mer de la vallee ou coule encore a plein
bord, malgre la saison, l'Arzeu, non loin de son embouchure.
Sur l'autre rive est construit le gros village de Tchivach (Sjak sur la
carte autrichienne); la traversee du fleuve serait impossible sans un
pont, et on l'entretient grace a un peage que percoit celui que le
village a charge de ce soin; le soleil est presque au ras de l'horizon
et semble se coucher dans la baie de Durazzo; les hommes de l'escorte
font halte, attachent les chevaux a une sorte de hangar a l'usage des
passants et me conduisent a des boutiques voisines, qui etalent en plein
vent des fruits et de grandes cuvettes de tabac hache; l'or brillant des
raisins et des poires ne le cede pas a l'or mat des copeaux de tabac
blond, et si les uns sont succulents, l'autre est parfume et merite la
celebrite dont il jouit.
Apres une legere collation de fruits et de pain de mais, arrosee d'un
verre d'excellent raki, que ne dedaignent pas mes souvarys, quoique
musulmans, nous faisons ample provision de tabac et repartons la nuit
tombante; la route franch
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