, une odeur de soufre tres forte me prend a la gorge;
j'interroge et l'on me montre sur la montagne proche des sources
sulfureuses tres riches, parait-il, ou les gens du pays viennent se
baigner, lieu predestine pour une ville d'eau des Balkans futurs.
Une chaine de montagnes, dite de Petrina, separe Okrida de Resna; la
route, pour aller chercher un col de 1200 metres, remonte vers le nord,
puis redescend au sud apres avoir gagne le point culminant, et bientot
atteint la plaine de Resna; le lac de Resna, beaucoup moins sauvage et
encaisse que celui d'Okrida, presente toutefois avec ce dernier
l'analogie d'etre continue au nord par une plaine d'alluvions qui separe
la rive du lac des pentes montagneuses. C'est au milieu de cette plaine
et fort loin du lac que la ville est construite; c'est un bourg
analogue a Struga, habite par une population melangee de Slaves, de
Turcs et de quelques Albanais; parmi les Macedoniens bulgares, plusieurs
parmi les plus actifs de Macedoine et meme du royaume sont nes dans
cette ville; je citerai notamment le ministre Liaptcheff, que je
rencontrai quelques semaines apres ce voyage a Sofia; c'est aussi le
lieu de naissance du "heros de la liberte", le Turc Niazi bey, pour
lequel les musulmans de Resna ont un veritable culte: on vient d'ouvrir
ici meme une ecole, et tout est encore en fete quand je traverse les
rues de la ville; des banderoles et des arcs de triomphe rappellent
l'inauguration; le marche regorge de monde; des fruits superbes, des
melons enormes y dressent leurs tas devant l'acheteur qui les obtient a
bas prix; des voitures nombreuses sont rangees le long des boutiques ou
sous des hangars, les unes allant a Okrida, la plupart, comme la notre,
se rendant a Monastir; c'est un lieu de passage tres frequente et place
a peu pres a egale distance de ces deux villes; aussi les voyageurs
coupent-ils habituellement ce voyage d'une dizaine d'heures par un arret
et un dejeuner a Resna.
Entre Monastir et Resna, une large route pas trop montueuse permet un
trafic important et des rapports faciles; un mouvement continuel de
voitures pour voyageurs et de chariots pour marchandises se produit
pendant la belle saison, et c'est au milieu de la poussiere soulevee par
le trot des chevaux et des provocations des cochers qui pretendent tous
se depasser, au risque de jeter bas leur equipage, que nous parvenons en
vue de Monastir.
* * * * *
Trois ou quatre kilome
|