qu'elles soient
en turc; apprenez le turc."
Cette propagande a d'abord un certain succes; jusqu'en 1908, les
Jeunes-Turcs, amis des beys, dont ils ont besoin pour s'etablir,
laissent la population libre et celle-ci ne connait et ne veut que
l'albanais; au Congres de Dibra, ils circonviennent les delegues de
l'Albanie du Nord, qui ne s'inquietaient guere du congres et de ce qui
s'y passait; ils persuadent les musulmans fanatiques de Scutari qui ne
connaissent pas un mot de turc que, voter pour la langue turque, c'est
voter pour le Padischah contre l'infidele, et ainsi ils font proclamer
contre le gre des delegues du Centre et du Sud que le turc doit devenir
la langue d'enseignement dans les ecoles albanaises.
Forts de ce vote, ils travaillent Tirana et la region en 1909 et 1910; a
cette date le peuple persuade reclame, en albanais d'ailleurs,
l'instruction en langue turque et manifeste contre les beys. Refik se
lamentait alors sur les malheurs de son pays: pauvre Albanie, disait-il,
trahie et opprimee! Deux ans se passent et a la tete d'une armee, par la
route d'Alessio et de Kroia, Essad, quittant Scutari, rentre en maitre.
Il songe que l'heure est venue ou Tirana la verte va devenir un des
centres d'action dans l'Albanie autonome.
CHAPITRE IV
A EL-BASSAM ET A SON CONGRES ALBANAIS
La demeure de Derwisch bey et ses serviteurs || Le Congres
albanais || Les delegues || La presse albanaise || La question
politique || La question religieuse || Les orthodoxes || La
situation des catholiques en Albanie et leur hierarchie
religieuse || La necessite d'un accord entre catholiques et
musulmans.
El-Bassam est en fete; de toutes les parties de l'Albanie, des delegues
arrivent aujourd'hui et on attend pour demain les representants des
villes les plus eloignees; c'est un va-et-vient continuel dans la
demeure du president du Congres, Derwisch bey; chaque nouvel arrivant ne
manque pas de le saluer et les conversations s'ebauchent dans la grande
cour ou Derwisch recoit ses hotes; sa demeure est composee de deux
batiments situes de chaque cote de cette cour; l'un est le haremlik
plein de luxe et de bibelots, reserve aux femmes et aux enfants; l'autre
est le selamlik, ou les hommes ont acces.
Dans la cour, pres de quelques arbres, des bancs et des tables sont
disposes; la chaleur du jour tombe et chacun vient gouter l'apaisement
du crepuscule et la fraicheur qui descend des montagnes
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