es du lac, cependant marecageux;
quand j'y passe, les routes et chemins sont envahis par l'eau; l'ouragan
des jours passes a cause une veritable inondation, et ce qui en subsiste
empeche presque les communications. La voirie n'est pas seule
defectueuse, mais aussi les habitudes locales, qui font d'Okrida la
ville la plus sale de ces pays; pour n'en point garder un trop mauvais
souvenir, il faut la voir de loin; apercue de la route de Struga, elle
se detache sur un fond de noires montagnes; au premier plan, les roseaux
du bord, des bandes de canards sauvages, des barques de pecheurs
composent une vision animee; vue de la route de Resna, elle apparait au
milieu de la verdure, entre deux petites collines qui supportent, l'une,
les casernes et l'autre, l'ancienne forteresse; ses minarets et ses
arbres semblent se mirer dans les eaux du lac tout proche, et dans la
lumiere du matin le tableau n'est pas sans charme.
A mesure que nous approchons des regions ou vit encore le paysan
bulgare, je remarque un changement notable de culture: aux champs de
mais succedent des champs de ble; sans doute le mais ne disparait pas,
pas plus qu'en Albanie le ble n'est absent; mais, tandis que, de Vallona
et de Durazzo jusqu'a Okrida, les tiges epaisses du mais s'offraient
partout aux regards, ce sont ici des epis murs qui couvrent la campagne
ou des champs a moitie fauches; c'est au milieu de terres a ble qu'est
bati le premier village bulgare que je rencontre depuis l'Adriatique:
c'est Kussly (Kosel sur la carte autrichienne).
Je m'empresse de photographier ses pauvres masures construites le long
de la route, au pied de la montagne; on est en plein travail de la
moisson; a cote des maisons aux minuscules fenetres et aux portes
surelevees, qui conservent l'aspect rebarbatif de petites forteresses,
des voitures du pays apportent les gerbes de ble qu'on vient de faucher
et, dans la cour, on les bat a l'ancienne mode; tout a cote du village,
dans un champ qui se prolonge jusqu'a la croupe pelee des collines, des
femmes ramassent les gerbes pour en charger d'autres voitures; ce sont
les premieres dont je vois le visage, depuis les catholiques de Mirditie
dans l'Albanie du Nord; elles portent le costume bulgare et l'une
d'elles, une jeune villageoise aux traits assez fins, vetue du corsage
traditionnel aux larges manches et d'une jupe blanche brodee, file sa
quenouille, en s'appuyant a une des voitures chargees de moissons. A
quelques pas de la
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