talite et rapidement nous gagnons le fond de la vallee a travers
des terres bien cultivees et un pays qui respire l'abondance; quand nous
allons atteindre le col qui fait communiquer le versant de l'Adriatique
et le bassin du Scoumbi avec le versant de la mer Egee et du lac
d'Okrida, la petite plaine ou est bati le village de Prienze apparait
comme un damier ou les cultures tapissent la terre de leurs couleurs aux
tonalites differentes.
Par de grands orbes, la route monte de six cents a plus de mille metres
et atteint le sommet de Cafa Sane, dont la base plonge de l'autre cote
dans le vaste lac d'Okrida. Par instants le soleil dechire les nues
opaques de l'orage qui nous entoure et eclaire la ville d'Okrida situee
juste en face sur l'autre rive; des montagnes aux pentes droites
baignent leur pied dans les eaux vert sombre du lac et de toute part des
forets epaisses bornent la vue; c'est la, parait-il, a l'extremite
meridionale, qu'un monastere bulgare celebre, celui de Saint-Naoum,
accueille les voyageurs. Mais d'ici, entre la montagne et les eaux, rien
n'apparait. Au nord du lac, au contraire, une plaine prolonge celui-ci
et le cadre montagneux est reporte assez loin; c'est la que Struga est
bati sur le lac, a la sortie du Drin noir, qui se fraye au nord un
passage a travers les plus hautes montagnes du pays pour arroser la
vallee de Dibra et se jeter dans le Drin blanc a Kukus, ou j'ai ete
l'hote du village pendant la premiere partie de mon voyage.
* * * * *
Le lac d'Okrida limite a l'est le territoire habite exclusivement par
des Albanais, et l'on peut dire qu'il forme de ce cote une frontiere
naturelle assez rationnelle pour l'Albanie autonome. En tout cas, qui a
passe de Durazzo au lac d'Okrida, a traverse dans toute sa largeur
l'Albanie du Centre. Par bien des traits elle differe de l'Albanie du
Nord que j'ai decrite naguere dans _l'Albanie inconnue_.
Dans le centre existe une veritable aristocratie feodale, agraire et
hereditaire, qui a etabli sur le pays une influence qui n'a rien de
tyrannique quand elle s'applique a des Albanais cultivateurs; les beys
sont des proprietaires dont les terres sont cultivees par des metayers,
commandes par le maitre lui-meme quand il est pauvre, par un intendant
quand le maitre est riche; ces metayers, tenanciers demi-libres,
demi-serfs, ne sont pas mal traites quand ce sont des Albanais, comme
ici, et d'ailleurs beaucoup sont en meme temps pe
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