e vous dites. Avec ce que vous avez il aura encore trois cent
mille francs un jour. C'est encore joli si vous voulez rassembler et
liquider cela. En terres, ca represente six ou sept mille livres de
rente. Si vous voulez le manger, c'est encore plus joli.
--Je n'ai pas l'intention de detruire l'unique avenir de mon fils. Mon
devoir est de me degager autant que possible des embarras ou je me
trouve.
--En ce cas, ecoutez: Vos terres et les siennes rapportent deux pour
cent. Vous payez les interets de vos dettes quinze et vingt pour cent;
avec les interets cumules, vous arriverez promptement a augmenter sans
fin le capital de la dette. Comment allez-vous faire?
--Il faut vendre, n'est-ce pas?
--Comme vous voudrez. Je crois que c'est dans votre interet bien
entendu, a moins que, pourtant, comme vous avez pour longtemps la
jouissance du bien de votre fils, vous ne preferiez profiter du
desordre, et faire votre part.
--Non, monsieur Bricolin, telle n'est pas mon intention.
--Mais vous pourriez encore tirer de l'argent de cette fortune-la, et
comme le petit a encore des grands parents dont il heritera, il pourrait
n'etre pas banqueroutier a l'epoque de sa majorite.
--C'est tres-bien raisonne, dit froidement Marcelle; mais je veux agir
tout autrement. Je veux tout vendre afin que les dettes de la succession
n'excedent pas le capital; et quant a ma fortune, je veux la liquider,
afin d'avoir le moyen d'elever convenablement mon fils.
--En ce cas, vous voulez vendre Blanchemont?
--Oui, monsieur Bricolin, tout de suite.
--Tout de suite? Oh! je le crois bien; quand on est dans votre position,
et qu'on veut en sortir franchement, il n'y a pas un jour a perdre,
puisque chaque jour fait un trou a la bourse. Mais croyez-vous que ce
soit bien facile de vendre une terre de cette importance tout de suite,
soit en bloc, soit en detail? Autant vaudrait dire que du jour au
lendemain on va vous batir un chateau comme celui-ci, assez solide pour
durer cinq ou six cents ans. Sachez donc _qu'au jour d'aujourd'hui_ on
ne remue de fonds que dans l'industrie, les chemins de fer et autres
grosses affaires ou il y a cent pour cent a perdre ou a gagner. Quant
aux proprietes territoriales, c'est le diable a deloger. Dans notre
pays, tout le monde voudrait vendre, et personne ne veut acheter, tant
on est las d'enterrer dans les sillons de gros capitaux pour un mince
revenu. La terre est bonne pour quiconque y reside, en vit et y fait
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