e mesure etait hardie, et exigeait un veritable courage. Le
directoire la mit sur-le-champ a execution, sans craindre les fureurs
qu'elle pouvait exciter chez le peuple, et les moyens de trouble qu'elle
pouvait fournir aux deux factions conjurees contre le repos de la
republique.
Outre ces mesures, il en imagina d'autres qui ne devaient pas moins
blesser les interets, mais qui etaient aussi necessaires. Ce qui
manquait surtout aux armees, ce qui leur manque toujours apres de
longues guerres, ce sont les chevaux. Le directoire demanda aux deux
conseils l'autorisation de lever tous les chevaux de luxe, et de
prendre, en le payant, le trentieme cheval de labour et de roulage.
Le recepisse du cheval devait etre pris en paiement des impots. Cette
mesure, quoique dure, etait indispensable, et fut adoptee.
Les deux conseils secondaient le directoire, et montraient le meme
esprit, sauf l'opposition toujours mesuree de la minorite. Quelques
discussions s'y etaient elevees sur la verification des pouvoirs, sur la
loi du 3 brumaire, sur les successions des emigres, sur les pretres, sur
les evenemens du Midi, et les partis avaient commence a se prononcer.
La verification des pouvoirs ayant ete renvoyee a une commission qui
avait de nombreux renseignemens a prendre, relativement aux membres dont
l'eligibilite pouvait etre contestee, son rapport ne put etre fait que
fort tard, et apres plus de deux mois de legislature. Il donna lieu a
beaucoup de contestations sur l'application de la loi du 3 brumaire.
Cette loi, comme on sait, amnistiait tous les delits commis pendant la
revolution, excepte les delits relatifs au 13 vendemiaire; elle excluait
des fonctions publiques les parens d'emigres, et les individus qui,
dans les assemblees electorales, s'etaient mis en rebellion contre les
decrets des 5 et 13 fructidor. Elle avait ete le dernier acte d'energie
du parti conventionnel, et elle blessait singulierement les esprits
moderes, et les contre-revolutionnaires qui se cachaient derriere eux.
Il fallait l'appliquer a plusieurs deputes, et notamment a un nomme Job
Ayme, depute de la Drome, qui avait souleve l'assemblee electorale de
son departement, et qu'on accusait d'appartenir aux compagnies de Jesus.
Un membre des cinq-cents osa demander l'abrogation de la loi meme. Cette
proposition fit sortir tous les partis de la reserve qu'ils avaient
observee jusque-la. Une dispute, semblable a celles qui diviserent si
souvent la convention, s
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