ra votre pipe, et je _vous
bige_. Venez le plus tot possible.
[1] Le comte Albert Grzymala, Polonais, ami de George Sand.
[2] Eugene Pelletan.
CLXII
A M. ADOLPHE GUBROULT, A PARIS
Nohant, 14 fevrier 1837.
Mon cher camarade,
Il faut absolument que vous me trouviez l'adresse de ma _suivante_. Je
vous envoie une seconde lettre pour elle, je suis extremement pressee
d'en avoir la reponse. Pardon, mille fois, de la corvee. Donnez-moi a
tous les diables; mais faites un dernier effort de courage pour obliger
le plus oublieux de vos amis.
Pour du talent, vous n'en manquez pas; votre article en est rempli. Mais
ce n'est pas le compliment que vous attendez de moi: vous voulez que je
rende justice a vos opinions. En leur rendant justice, je ne vous dirai
que des injures.
Oui, mon ami, _vous etes une canaille, une franche canaille. Ah!
Bertrand, je ne vous reconnais pas la!_
Que vous vouliez du bien aux Arabes, que vous soyez tente de travailler
a leur liberte, que vous accusiez le despotisme de l'Egyptien, soit:
c'est prendre le bon cote des choses, en ce qui concerne l'Orient. Mais,
malheureux (je parle ici aux saint-simoniens plus qu'a vous), vous
abandonnez la cause de la justice et de la verite en France, la ou elle
pouvait etre comprise plus vite que partout ailleurs et ou elle le sera,
n'en doutez pas, par nos enfants.
Si peu que vous eussiez fait, on eut pu dire qu'il existait une societe
conservatrice du grand principe d'egalite. Principe banni, chasse, honni
et persecute par toute la terre, mais refugie dans le coeur d'un petit
nombre d'hommes de bien. Un jour, vous eussiez ete des dieux peut-etre!
Vous avez ete force de chercher a l'etranger des moyens d'existence. Il
vaudrait mieux se bruler la cervelle que de les tenir d'un gouvernement
infame, d'un homme qui est le principe incarne d'oppression et de
demoralisation. S'expatrier est deja une faiblesse. Vous avez cede a
la persecution. Vous avez rougi, non de votre misere, qui vous rendait
veritablement grand, mais de votre impuissance sur l'opinion, qui
accusait le manque de talent dans la direction supreme de votre secte.
Vous avez en tort. Si faible que fut la redaction de votre morale, comme
cette morale etait la seule, la vraie, elle eut fini par attirer sur
vous la consideration que vous meritez. Et, si la grande affaire ne se
fut pas operee un jour au nom de Saint-Simon et d'Enfantin, du moins
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