, que
votre lettre m'a cause un profond chagrin. Sachant combien j'ai d'estime
et d'amitie pour vous, elle s'est plu a me dire combien vous lui etes
sympathique, non seulement a cause de votre admirable talent, mais
encore pour votre coeur et votre noble caractere.
Elle est tres souffrante a present, et je la trouve si changee et si
affaiblie, que je crains pour sa poitrine. Ces chagrins, petits ou
grands, lui font beaucoup de mal, et je les lui epargne tant que je
peux. Me pardonnerez-vous de lui epargner encore celui de savoir
combien vous la jugez mal? Sans doute, tout cela vient d'un malentendu.
L'artiste travaille pour vivre apres tout, moi plus que tout autre; car
je n'aime point la gloire, et j'ai de grands besoins d'argent. Le pretre
doit vivre de l'autel. Elle a pu croire que ce serait de sa part une
indiscretion, de vous faire faire deux portraits, pour rien. Si elle
ne les a pas acceptes _en ami_, c'est parce qu'elle ne s'est pas cru,
aupres de vous, les droits d'un ami. Ce n'est certainement pas qu'elle
eut dedaigne votre amitie, si elle eut compris que vous travailliez pour
elle absolument en ami.
Comment pourrait-elle avoir le moindre doute sur votre delicatesse et
sur votre fierte? Avant de vous connaitre personnellement, ne vous
connaissait-elle pas par moi?
Pensez-vous que je ne lui aie pas donne de vous l'opinion qu'elle doit
avoir? Je ne sais pas ce que c'est que l'affaire de Batta dont vous
me parlez; mais je sais que Marie parle de vous avec la plus vive
sympathie, et que la sympathie n'est point un mot banal chez elle.
Reflechissez donc bien, mon cher ami, avant de lui renvoyer cet argent;
ce serait bien dur et bien sec. Et, quand meme elle aurait eu tort de
vous l'envoyer, l'intention n'etant pas mauvaise, l'action ne doit pas
etre severement examinee.
Si vous pensez que ces assurances de ma part ne soient pas une garantie
suffisante, et que mon jugement sur cette affaire ne satisfasse pas
entierement votre dignite, je ferai absolument ce que vous voudrez.
Ecrivez-moi. Vous savez que je suis tout a vous du fond du coeur; mais
j'engage, par avance, mon honneur a vous prouver que Liszt et Marie ont,
a votre egard, des sentiments tout a fait opposes a ceux que vous leur
supposez. Quant au petit article, j'en ai parle a Liszt et il m'a priee
de ne pas fermer ma lettre sans qu'il y inserat un mot de reponse.
A mon tour, je vous adresse une demande. Veuillez jeter les yeux sur les
belles grav
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