t odieux. La maternite a
d'ineffables delices; mais, soit par l'amour, soit par le mariage, il
faut l'acheter a un prix que je ne conseillerai jamais a personne d'y
mettre. Quand je suis loin de mes enfants, dont l'education absorbe une
grande part du temps, je cherche la solitude et j'y trouve, depuis que
j'ai renonce a beaucoup de choses impossibles, des douceurs que je
n'esperais pas.
Je tacherai de les exprimer, sous une forme poetique, dans un de mes
ouvrages que j'augmente d'un volume: _Lelia_, que vous avez la bonte de
juger avec indulgence et ou j'ai mis plus de moi que dans tout autre
livre. Puisque vous me croyez en savoir plus long que vous sur la
science de la vie, je vous renvoie a la prochaine reimpression de cet
ouvrage.
Mais j'ai bien peur que vous ne vous trompiez en m'attribuant le pouvoir
de vous guerir. Vous trouverez de vous-meme tout ce que j'ai trouve, et
vous le trouverez mieux approprie a vos facultes. Esperez, il y a des
temps d'epreuves; mais celui qui nous fait malheureux prend soin de nous
alleger le fardeau quand il devient trop lourd. Vous me paraissez etre
un de ses _vases d'election_. Vous avez donc a le remercier _d'etre_,
sauf a savoir de lui, peu a peu, a quoi il vous destine.
Je voudrais etre de ceux qui le prient avec ardeur et qui sont surs
d'etre exauces. Je lui demanderais pour vous le bonheur ou, tout au
moins, le calme et la resignation que vous me semblez faite pour
comprendre et digne de posseder.
Agreez l'assurance de ma haute consideration.
GEORGE SAND.
CLV
A M. ALEXIS DUTEIL, A LA CHATRE
Geneve, septembre 1836.
Je passe mon temps fort agreablement a Geneve, mon cher ami. Je te
raconterai cela en detail, au coin du feu. J'ai a peine le temps de
dormir. Mais je veux te dire que j'ai recu ta lettre et que je te
remercie mille fois de t'occuper de ton camarade absent et de ne pas
negliger ses affaires, qu'il neglige si bien.
Et la vendange! cher Dyonisius? Songe a la vendange! songe a te faire du
vin blanc potable. Ne neglige pas un point aussi important.
Je serai a Nohant dans les premiers jours d'octobre. Je pars d'ici le
30. Je m'arreterai a Lyon. Je te porte du bon tabac a priser, et force
cigarettes.
Adieu, bon vieux; dis a ta femme que je l'aime; aimez-moi, tous deux. A
bientot!
Mes mioches se portent a merveille. Ils supportent la fatigue
heroiquement. Ursule n'est pas de meme.[1] Elle etait tres epouv
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