les joies de la mere, du moins,
ne lui manqueraient pas.
C'est que si le present suffisait a ses modestes ambitions, l'avenir
avait cesse de l'inquieter.
Jamais il n'avait ete question entre elle et son mari de leurs hotes
d'une soiree, jamais il ne lui parlait du _Comptoir de credit mutuel_,
mais il n'avait pas ete sans laisser echapper de ci et de la quelques
exclamations qu'elle enregistrait precieusement, et qui trahissaient
des affaires prosperes.
--Ce Thaller est un rude matin! s'ecriait-il, et qui a une chance
infernale!
Et d'autres fois:
--Encore deux ou trois operations comme celle que nous venons de
reussir, et nous pourrons fermer boutique!...
Que conclure de la, sinon qu'il marchait a grands pas vers cette
fortune, objet de toutes ses convoitises.
Deja, dans le quartier, il avait cette reputation qui est le
commencement de la richesse, d'etre tres-riche. On l'admirait de tenir
sa maison avec une economie severe, car on estime toujours un homme
qui a de l'argent de ne le point depenser.
--Ce n'est pas lui, bien sur, qui mangera ce qu'il a, repetaient les
voisins.
Les gens qu'il recevait le samedi le croyaient plus qu'a l'aise. Quand
M. Desclavettes et M. Chapelain s'etaient bien plaints, l'un de sa
boutique et l'autre de son etude, ils ne manquaient pas d'ajouter:
--Vous riez de nos plaintes, vous qui etes lance dans les grandes
affaires ou l'on gagne ce qu'on veut.
Ils semblaient d'ailleurs tenir en haute estime ses capacites
financieres. Ils le consultaient et suivaient ses conseils.
M. Desormeaux disait:
--Oh! il s'y entend.
Et Mme Favoral se plaisait a se persuader que, sous ce rapport au
moins, son mari etait un homme remarquable. Elle attribuait a des
preoccupations superieures son mutisme et ses distractions. De meme
qu'il lui avait appris a l'improviste qu'il avait de quoi vivre, elle
pensait qu'un beau matin il lui annoncerait qu'il etait millionnaire.
IX
Mais le repit accorde par la destinee a Mme Favoral touchait a son
terme, les epreuves allaient revenir, plus poignantes que jamais,
occasionnees par ses enfants, tout son bonheur jusqu'alors, et sa
seule consolation.
Maxence allait avoir douze ans. C'etait un brave petit garcon,
d'une intelligence eveillee, travaillant a ses heures, mais d'une
inconcevable etourderie et d'une turbulence que rien ne pouvait
dompter.
A l'institution Massin, ou on l'avait place, il faisait blanchir les
cheveux de s
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