ir avec l'age.
Le moment arriva ou il ouvrit les yeux sur le regime auquel etait
soumise la maison paternelle. Il y vit cette economie inquiete qui
semble denoncer la gene, et les apres discussions que soulevait
l'emploi inconsidere d'une piece de vingt francs. Il vit sa mere
realiser des miracles d'industrie pour dissimuler la pauvrete de
sa toilette et recourir a la plus savante diplomatie quand elle
souhaitait acheter une robe neuve a Gilberte.
Et lui, malgre tout, se trouvait avoir a sa disposition autant
d'argent que ceux d'entre ses camarades; dont les parents passaient
pour etre les plus opulents et les plus genereux.
Inquiet, il interrogea.
--Eh! que t'importe! lui repondit sa mere, toute rougissante et toute
embarrassee, voila-t-il pas un grave sujet de preoccupation!
Et comme il insistait:
--Va, nous sommes riches, lui dit-elle.
Mais il ne pouvait la croire, accoutume qu'il etait a toujours
entendre crier misere, et comme il fixait sur elle de grands yeux
surpris:
--Oui, reprit-elle, avec une imprudence qui, fatalement, devait porter
ses fruits, nous sommes riches, et si nous vivons comme tu le vois,
c'est que cela convient a ton pere, qui veut amasser une fortune plus
grande encore.
Ce n'etait pas une reponse, et cependant Maxence n'en demanda pas
plus. Mais il s'informa de droite et de gauche, avec cette adresse
patiente des jeunes gens armes d'une idee fixe.
Deja, a cette epoque, M. Vincent Favoral avait dans le quartier, et
meme parmi ses amis, la reputation d'etre pour le moins millionnaire.
Le _Comptoir de credit mutuel_ avait pris des developpements
considerables; il avait du, pensait-on, en profiter largement, et les
benefices avaient du grossir vite entre les mains d'un homme aussi
habile que lui et dont la severe economie etait celebre.
Voila ce qu'on dit a Maxence, mais non sans lui donner ironiquement a
entendre qu'il aurait tort de compter sur la fortune paternelle pour
mener joyeuse vie.
M. Desormeaux lui-meme, qu'il avait interroge assez adroitement, lui
dit en lui frappant amicalement sur l'epaule:
--S'il vous faut jamais de la monnaie pour vos fredaines de jeune
homme, tachez d'en gagner, car ce n'est sacrebleu pas papa qui vous en
fournira.
De telles reponses compliquaient, au lieu de l'expliquer, le probleme
qui troublait Maxence.
Il observa, il epia, et enfin il en arriva a acquerir la certitude que
l'argent qu'il depensait etait le produit du travail de
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