t ainsi que s'ecoula la jeunesse de Maxence, entre des
exagerations egalement funestes, entre les brutalites revoltantes de
son pere et les gateries dangereuses de sa mere, prive de tout par
l'un et par l'autre comble.
Car Mme Favoral avait trouve l'emploi de ses humbles economies.
Si jamais l'idee n'etait venue au caissier du _Comptoir de credit
mutuel_, de mettre quelques sous dans la poche de Maxence, la trop
faible mere lui eut cree des besoins d'argent pour avoir cette joie de
les satisfaire.
Elle, qui avait devore tant d'humiliations en sa vie, elle n'eut pu
supporter de savoir son fils souffrant en son amour-propre, et reduit
a reculer devant ces menues depenses qui sont la vanite des ecoliers.
--Tiens, prends, lui disait-elle, les jours de promenade, en lui
glissant dans la main quelques pieces de vingt sous.
Malheureusement, elle joignait a son cadeau la recommandation de n'en
rien laisser deviner au pere ne comprenant pas qu'elle dressait
ainsi Maxence a la dissimulation, faussant sa droiture naturelle et
pervertissant ses instincts.
Non, elle donnait. Et pour reparer les breches faites a son tresor,
elle travaillait jusqu'a se gater la vue, avec une si apre ardeur,
que la digne marchande de la rue Saint-Denis lui demandait si elle
n'employait pas des ouvrieres. Elle ne se faisait aider que par
Gilberte, qui des l'age de huit ans savait deja se rendre utile.
Et ce n'est pas tout. Pour ce fils, en prevision de depenses
croissantes, elle descendait a des expedients qui, jadis, pour
elle-meme, lui eussent paru indignes et deshonorants. Elle vola le
menage, faisant danser l'anse de son propre panier. Elle en vint a se
confier a sa domestique et a faire de cette fille la complice de ses
manoeuvres. Elle s'ingeniait a servir a M. Favoral des diners ou
l'excellence de la sauce l'empechait de remarquer l'absence du
poisson. Et le dimanche, quand elle rendait ses comptes hebdomadaires,
c'est sans rougir qu'elle augmentait de quelques centimes le prix de
chaque objet, s'applaudissant quand elle avait ainsi grappille une
douzaine de francs, et trouvant, pour se justifier a ses yeux, de ces
sophismes qui jamais ne font defaut a la passion.
Au debut, Maxence etait trop jeune pour se preoccuper des sources
ou sa mere puisait l'argent qu'elle prodiguait a ses fantaisies
d'ecolier.
Elle lui recommandait de se cacher de son pere, il se cachait et
trouvait cela tout naturel.
Le discernement lui devait ven
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