ont l'entendement
subtil.
Leur pere leur a bien dit, d'un ton grave, qu'il n'est rien de
respectable en ce monde que le travail et la probite, mais ils ont
surpris ce meme pere saluant a peine un pauvre diable d'honnete homme,
et s'inclinant jusqu'a terre devant quelque gredin fletri par trois
jugements, mais riche de six millions.
Conclusion?... Oh! ils s'entendent a conclure, car il n'est tels que
les jeunes gens pour etre logiques et deduire d'un fait ses dernieres
consequences.
Ils savent, pour la plupart, qu'il leur faudra faire quelque chose,
mais quoi? Et c'est alors que, pendant les recreations, leur
imagination s'exerce a chercher cette fameuse profession, jusqu'ici
introuvable, qui donne la fortune sans travail et la liberte en meme
temps qu'une situation brillante.
C'est eux qu'il faut entendre eplucher et discuter toutes les
carrieres qui s'ouvrent aux jeunes ambitions. Et que de rires, si
quelque naif s'avise de citer un de ces emplois modestes ou l'on gagne
au debut cent cinquante francs! c'est a peine ce que depense tel
externe, rien que pour ses cigares et ses voitures quand il est en
retard.
Maxence n'etait ni meilleur ni pire que les autres. De meme que les
autres, il s'ingenia a decouvrir le metier ideal qui enrichit son
homme en l'amusant.
Sous pretexte qu'il dessinait joliment, il parla de se faire peintre,
calculant avec aplomb ce que rapporte la peinture et comptant d'apres
un journal ce que gagnent Corot ou Gerome, Ziem, Daubigny et quelques
autres, qui recueillent enfin le prix d'incessants efforts et
d'ecrasants labeurs.
Mais en fait de tableaux, M. Vincent Favoral n'appreciait que les
vignettes bleues de la banque de France.
--Je ne veux pas d'artiste dans ma famille! declara-t-il, d'un ton qui
n'admettait pas de replique.
Maxence eut ete volontiers ingenieur, car l'ingenieur est a la mode.
Mais les examens de l'Ecole polytechnique sont roides. Ou officier de
cavalerie. Mais les deux annees de Saint-Cyr manquent de gaiete. Ou
chef de bureau comme M. Desormeaux, mais il faut commencer par etre
surnumeraire.
Apres avoir longtemps hesite entre le droit et la medecine, il finit
par reconnaitre qu'il voulait etre avocat, influence surtout par les
joyeuses legendes du quartier latin.
Ce n'etait pas precisement le reve de M. Vincent Favoral.
--Cela va couter encore de l'argent, gronda-t-il.
Or, il s'etait berce de cette fausse esperance que son fils, au sortir
du lyce
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