ures a table et de l'esprit de gendarme
_a mort_. Puis une soiree dansante, dans un superbe salon. Voila tout ce
qu'il y a a dire de la societe; j'y ai rencontre une demi-douzaine de
personnes qui pretendaient me connaitre et que je ne connais ni d'Eve ni
d'Adam. Un vrai _tas de particuliers_. Il y aurait de bonnes scenes de
moeurs de province a faire sur l'interieur de nos hotes, bonnes gens,
excellents, mais gendarmes! un gendarme, deux gendarmes, trois, quatre,
six, huit, quarante gendarmes! c'est curieux dans son genre.
Demain, le concert est a _onze heures du matin_, ce qui caracterise la
vie cambresienne. Ma presence en cette bonne ville est une des moins
desagreables apparitions que j'aie faites en province. Je crois que
personne n'y avait jamais entendu prononcer mon nom, ce qui me met fort
a l'aise.
On nous dit qu'il y a ici dans une eglise, un Rubens, _Descente de
croix_.--La veritable! disent-ils; celle d'Anvers est, selon eux, une
copie. Cela me fait l'effet d'une blague indigene. Nous irons tout de
meme voir ca, apres le concert. Apres-demain, autre concert, toujours a
onze heures du matin, et, le soir, nous repartons. Je revole dans les
bras de mes mignons, pour les _biger_ a mort.
Recevrai-je de vos nouvelles demain? Je le voudrais bien. Bonsoir, mes
cheris. Dis a ma grosse d'etre sage, afin que je puisse, l'emmener si je
refais un voyage. Qu'elle soit bonne; car, si madame Marliani se plaint
d'elle, j'aurai moins de plaisir a l'embrasser.
Bonsoir, mille baisers, a mardi.
TA VIEILLE.
CCII
AU MEME, A GUILLERY, PRES NERAC
Paris, 4 septembre 1840.
Mon enfant cheri,
Nous nous portons bien. Nous ayons recu ta lettre, que nous attendions
avec impatience, tu peux bien le croire. Je suis tres reconnaissante
envers Levassor de t'avoir un peu egaye en route et surtout au depart;
car c'etait le moment difficile. Moi aussi, j'avais le coeur bien gros;
mais je ne voulais pas attrister davantage le commencement d'un voyage
ou tu t'amuseras, j'espere, et qui te fera du bien.
Donne-toi du mouvement puisque tu es a meme, et fortifie-toi. Reviens
ici rassasie de plaisir, afin de pouvoir reprendre le travail un peu
plus ardemment que par le passe. Je ne veux pas t'ecrire des reproches.
J'espere que tu feras des reflexions serieuses sur le temps que tu as
perdu et que tu seras resolu a le regagner. Il ne te reste pas beaucoup
d'annees a flaner avant d'etre un hom
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