nu l'irreflexion des adolescents, leurs
gambades ni leurs deportements. La vie toujours chez nous rencontra des
obstacles. Nous n'avons pas eu le sentiment de la force, cette energie
vitale qui pousse le jeune homme hors de lui-meme. Je ne me crus jamais
invincible. Et en meme temps, j'ai eu peu de confiance dans les autres.
Notre existence, qui peut paraitre triste et inquiete, fut du moins
clairvoyante et circonspecte. Ce sentiment de nos forces emoussees nous
engage vivement a ne negliger aucune de celles qui nous restent, a en
augmenter l'effet par un meilleur usage, a les fortifier de toutes les
ressources de l'experience.
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Tel est notre corps, nous disions-nous l'un a l'autre, et c'est un des
plus satisfaisants qu'on puisse trouver pour le jeu des grandes
experiences.
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_Examen moral_
Nous continuames notre examen; et laissant notre corps, nous cherchions
a eclairer notre conscience.
Silencieux et retires, d'apres un plan methodique, nous avons passe en
revue nos peches, nos manques d'amour. A ce tres long labeur je trouvai
infiniment d'interet. Et Simon, au diner du dernier jour, une heure
avant la confession solennelle, me disait;
--Aujourd'hui, comme le malade arrive a connaitre la plaie dont il
souffre et qu'il inspecte a toute minute, je suis obsede de la laideur
qu'a prise mon ame au contact des hommes.
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Nous avions decide de passer nos fracs, cravates noires, souliers
vernis, de boire du the en goutant des sucreries, et de nous coucher
seulement a l'aube, afin de marquer cette grande journee de quelques
traits singuliers parmi l'ordinaire monotonie de notre retraite (car il
faut considerer qu'un decor trop familier rapetisse les plus vives
sensations).
Quand nous fumes assis dans les deux ganaches de la cheminee, toutes
lampes allumees et le feu tres clair, Simon, qui sans doute attachait
une grande importance a ces premieres demarches de notre regeneration,
etait emu, au point que, d'enervement presque douloureux mele
d'hilarite, il fit, avec ses doigts crispes en l'air, le geste d'un
epileptique.
Je notai cela comme un excellent signe, et je sentis bien les avantages
d'etre deux, car par contagion je goutai, avant meme les premiers mots,
une chaleur, un entrain un peu grossier, mais tres curieux.
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Et d'abord parcou
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