e l'ame de Flaubert, cet esprit
contradictoire et dechire, que le reel sollicitait et repoussait, que la
beaute attirait mais qui ne parvint a l'imaginer qu'antique et
documentaire, qui sentit la seduction du mystere et fut le plus
explicite des stylistes, qui concut la synthese du particulier dans le
general et cependant dissequa des ames particulieres, ecrivit en phrases
analytiques et discretes, et s'abstint de toute generalisation. Dans ces
alliances adverses, dans ces ideaux contradictoires, semble resider le
genie, l'originalite, le caractere, l'indice psychologique particulier
de Flaubert, qui n'eut dans toute sa carriere, que cette chose chez lui
primordiale et terme commun, le style.
III
LES CAUSES
_Resume des faits:_--Apres avoir fait l'analyse du vocabulaire, de la
syntaxe, de la metrique, de la composition de Flaubert, nous avons
enumere ses procedes de description et de psychologie qui se reduisent a
ceux du realisme,--les caracteres generaux de son art, qui sont la
concision, la contention, et, resultat saillant general, le statisme.
Les impressions principales que nous parurent produire les oeuvres ainsi
edifiees, furent la verite, la beaute, le mystere, le symbolisme, effets
que coordonne en serie un pessimisme violent ou ironique. Il faut
ajouter a ses renseignements isoteriques sur Flaubert ceux que
fournissent la connaissance de sa methode de travail, la lenteur et la
difficulte de sa redaction, son effort constant, une fois le plan
general arrete et les notes recueillies, pour achever chaque phrase,
chaque paragraphe, chaque page avant de passer a la suite.
Ces donnees mettent en presence deux series de faits contradictoires;
d'une part, l'amour des mots precis, des phrases autonomes et statiques,
des descriptions exactes, de la psychologie analytique, l'abondance des
faits dans la contexture de l'oeuvre, le recours constant a
l'observation et a l'erudition, l'impression de verite que donnent les
livres de Flaubert; d'autre part, son excellence a rendre la beaute
pure, le mystere, le general, sa haine et sa souffrance du reel, ses
echappees vers le roman historique et vers l'allegorie, la splendeur de
son style, l'harmonie de ses periodes, la magnificence diffuse ou
precise de ses mots. Les _Souvenirs_ de M. Maxime Ducamp attestent la
perpetuelle oscillation de Flaubert entre le roman realiste et des
oeuvres plus ideales. Enfin certains passages de ses lettres indiquent a
la fois l'une e
|