e que vous vous interessez a lui,
monsieur le comte?
-- Mieux vaudrait peut-etre pour son avenir que l'on ignorat qu'il
m'ait jamais connu.
-- Oh! monsieur! s'ecria le jeune homme.
-- Vous savez, Bragelonne, dit le comte, que je ne fais jamais
rien sans raison.
-- Oui, monsieur, repondit le jeune homme, je sais que la supreme
sagesse est en vous, et je vous obeirai comme j'ai l'habitude de
le faire.
-- Eh bien! comte, laissez-le-moi, dit la duchesse; je vais
envoyer chercher le prince de Marcillac, qui par bonheur est a
Paris en ce moment, et je ne le quitterai pas que l'affaire ne
soit terminee.
-- C'est bien, madame la duchesse, mille graces. J'ai moi-meme
plusieurs courses a faire aujourd'hui, et a mon retour, c'est-a-
dire vers les six heures du soir, j'attendrai le vicomte a
l'hotel.
-- Que faites-vous, ce soir?
-- Nous allons chez l'abbe Scarron, pour lequel j'ai une lettre,
et chez qui je dois rencontrer un de mes amis.
-- C'est bien, dit la duchesse de Chevreuse, j'y passerai moi-meme
un instant, ne quittez donc pas ce salon que vous ne m'ayez vue.
Athos salua madame de Chevreuse et s'appreta a sortir.
-- Eh bien, monsieur le comte, dit en riant la duchesse, quitte-t-
on si serieusement ses anciens amis?
-- Ah! murmura Athos en lui baisant la main, si j'avais su plus
tot que Marie Michon fut une si charmante creature!...
Et il se retira en soupirant.
XXIII. L'abbe Scarron
Il y avait, rue des Tournelles, un logis que connaissaient tous
les porteurs de chaises et tous les laquais de Paris, et cependant
ce logis n'etait ni celui d'un grand seigneur ni celui d'un
financier. On n'y mangeait pas, on n'y jouait jamais, on n'y
dansait guere.
Cependant, c'etait le rendez-vous du beau monde, et tout Paris y
allait.
Ce logis etait celui du petit Scarron.
On y riait tant, chez ce spirituel abbe; on y debitait tant de
nouvelles; ces nouvelles etaient si vite commentees, dechiquetees
et transformees, soit en contes, soit en epigrammes, que chacun
voulait aller passer une heure avec le petit Scarron, entendre ce
qu'il disait et reporter ailleurs ce qu'il avait dit. Beaucoup
brulaient aussi d'y placer leur mot; et, s'il etait drole, ils
etaient eux-memes les bienvenus.
Le petit abbe Scarron, qui n'etait au reste abbe que parce qu'il
possedait une abbaye, et non point du tout parce qu'il etait dans
les ordres, avait ete autrefois un des plus coquets prebendiers de
la ville du Ma
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